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Quelle stratégie de sécurité nationale pour le nouveau quinquennat ?

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Quelle stratégie de sécurité nationale pour le nouveau quinquennat ?

Comme à l’accoutumé, cette élection présidentielle a peu abordé les questions internationales. Reconnaissons que ce n’est pas un sujet qui passionne la majorité des Français, légitimement plus préoccupés par l’emploi et donc indirectement par l’économie.

Le seul débat a concerné la fermeture des frontières et la lutte contre le terrorisme islamique, avec la promesse de moyens supplémentaires. Hormis le « plus d’Europe » et le « moins d’Europe », les questions internationales n’ont donc été que peu abordées.

Pourtant, depuis 1958, la diplomatie et la défense constituent les domaines réservés du président de la Ve République, y compris en cohabitation. Selon la Constitution, il est le « garant de l’indépendance nationale, de l’intégrité du territoire, des traités » et « chef des armées ». Engager sa diplomatie et ses forces armées au service d’une stratégie de sécurité nationale, représente l’expression de la souveraineté nationale et d’une certaine idée de la France.

Le président Macron a cependant montré ses priorités en sécurité nationale dans ce premier gouvernement. Gérard Collomb, ministre de l’intérieur, est le n°2 derrière le Premier ministre. Sylvie Goulard, ministre des Armées, et non de la défense, est une européenne convaincue et n°4 du gouvernement. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense de François Hollande, est désormais « ministre de l’Europe et des affaires étrangères » et n°5 du gouvernement.

Un environnement stratégique instable

La nouvelle vision stratégique dépendra cependant de la perception des menaces ou des instabilités, la sécurité intérieure et la sécurité extérieure étant désormais étroitement liées. Les enjeux stratégiques deviennent d’importance pour le nouveau président de la République avec différentes orientations possibles :

1. Maintenir ou essayer de maintenir un engagement européen dans le domaine de la sécurité commune. Avec l’arrivée d’Emmanuel Macron au pouvoir, la France reste dans l’OTAN. L’Europe de la défense est cependant une priorité au moins en affichage. Nul doute que le sommet de l’OTAN du 27 mai apportera des éléments sur les orientations du nouveau chef des armées.

2. A nos frontières communes, quels seront les rapports avec les Etats du sud de la Méditerranée d’une part, d’autre part avec ceux de la Méditerranée orientale. Se posent en effet les questions du contrôle de l’immigration illégale, de la liberté d’action à combattre des mouvements terroristes islamistes, de la place de la Turquie aussi bien dans sa volonté certes faiblissante d’adhérer à l’Europe que dans son autoritarisme et sa place dans l’OTAN, enfin du conflit entre Israël et ses voisins arabes.

3. Aux frontières orientales de l’Europe, nul ne peut ignorer la crainte des européens de l’Est face à la Russie. Or, l’OTAN et l’implication américaine paraissent pour la plupart de ces Etats les seules garanties pour leur sécurité.

4. Concernant la guerre à mener sur les bases arrière de l’islamisme radical, la question de l’engagement solitaire de la France devra être posée que ce soit à ses alliés européens ou otaniens. En visite à l’opération Barkhane ce 19 mai, Emmanuel Macron a rappelé que la France resterait engagée au Sahel où elle est déjà depuis quatre ans. Les armées françaises sont les sentinelles de la République face au terrorisme islamique mais les Etats du Sahel concernés devront faire preuve de leur engagement à trouver une sortie de crise.

5. Cependant la sécurité lointaine ne peut être ignorée. La réputation des forces françaises, et donc cette alternative à l’imprévisibilité américaine, peut conduire à un plus grand engagement français dans le Pacifique d’autant que nous y avons des intérêts. Quelle sera notre stratégie à la fois diplomatique et militaire d’une part face à la montée des exigences chinoises et d’une Chine qui contrôle partiellement notre économie, développant en outre une stratégie mondiale par la réalisation d’une nouvelle « route de la soie », d’autre part face à la montée de la menace militaire et nucléaire de la Corée du Nord ?

6. Enfin la France a toujours été sensible à un désarmement mondial raisonnable et contrôlé notamment nucléaire, chimique, spatial. Il faut reconnaître que la situation internationale a tellement évolué que cet aspect de la stratégie française a bien disparu des écrans radars depuis quelques années. Or, ces domaines font partie de la stratégie de sécurité nationale.

Pour conclure, une stratégie de sécurité nationale associant la politique étrangère et la politique de défense, sinon l’économie et l’influence culturelle française, est fondamentalement une affaire de souveraineté. Elle est à vocation mondiale qu’il faut concilier avec celle d’autres alliés dans le cadre d’une convergence d’intérêts.

Le nouveau président de la République a cependant reçu en héritage les conflits en cours et la nécessaire reconstruction d’une stratégie de sécurité nationale cohérente. Une vision gaullienne semble heureusement bien se dessiner avec une certaine idée de la France et de sa place dans le monde. Restent à donner les moyens à cette stratégie de sécurité nationale.

Par le général (2S) François Chauvancy

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