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Allemagne: les enseignements de la campagne électorale

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Allemagne: les enseignements de la campagne électorale

Victoire annoncée mais en demi-teinte pour Angela Merkel. Percée des extrêmes, formation compliquée de la coalition gouvernementale à venir et crise sociale-démocrate: les premières leçons de la campagne électorale, et les défis à venir, se dessinent.

– Victoire à la Pyrrhus ? –

La chancelière paraît promise au vu des sondages à un quatrième mandat, synonyme de possible record de longévité au pouvoir dans l’Allemagne d’après-guerre. Mais le score qui se profile pour son parti conservateur (34-36% contre 21-22% aux sociaux-démocrates) est inférieur à l’objectif d’au moins 40% qu’il s’était fixé en interne et proche de celui enregistré en 1998 lorsque les démocrates-chrétiens avaient perdu le pouvoir (35,1%). Cela risque d’alimenter au sein de la CDU et de la CSU les critiques sur le cap centriste de sa politique. Mais aussi de compliquer la formation de la future coalition majoritaire dans un Parlement émietté.

– Droite dure au Bundestag –

“Merkel, la mère de l’AfD”, s’emporte cette semaine un des éditorialistes du Spiegel. Qu’elle ait ou non contribué à son essor en accueillant un million de migrants, Angela Merkel s’apprête à rester aussi dans l’histoire pour ne pas avoir pu empêcher l’arrivée de la droite nationaliste à la chambre des députés. L’Alternative pour l’Allemagne (AfD) est créditée de 10-13% dans les sondages et peut espérer au moins une cinquantaine d’élus. Une ampleur jamais vue depuis la guerre. Si elle fait depuis longtemps partie du paysage politique en Europe, la présence au Parlement national d’une droite populiste qui fait campagne pour la fin de la repentance des horreurs du IIIe Reich va briser un tabou en Allemagne. Outre la question des migrants, l’AfD profite de la montée des inégalités sociales et de la précarité, revers de la médaille du taux de chômage très bas. Un thème sur lequel prospère aussi la gauche radicale, qui peut prétendre également à plus de 10%, davantage qu’en 2013.

– Quel gouvernement ? –

Angela Merkel et les conservateurs ne devraient pas avoir la tâche facile pour former une majorité. Certes, une reconduction de l’actuelle “grande coalition” avec les sociaux-démocrates est possible. Mais cette formule, appliquée déjà au cours de deux des trois dernières législatures, séduit de moins en moins l’opinion et la base du SPD. Plus le score social-démocrate sera faible, plus la tentation des militants d’une cure d?opposition sera grande. Or, avec autour de 22%, les sondages prédisent au plus vieux parti d’Allemagne le pire score de son histoire d’après-guerre.

Une alliance des conservateurs et des Libéraux du FDP serait la plus naturelle. Mais au vu des sondages, elle risque de ne pas suffire à atteindre la majorité. Resterait alors l’option de l’élargir aux écologistes, une première. Problème: les divergences de fond entre Verts d’une part, Libéraux et aile la plus conservatrice de la famille politique de la chancelière d’autre part sont très importantes. Les négociations pour former un gouvernement risquent de durer jusqu’en fin d’année.

– Quel cap politique ? –

Des contours de la coalition dépendront les futurs choix de l’Allemagne en Europe et dans le monde. Les questions internationales ont été quasi-absentes de la campagne. Éprise de stabilité au point qu’on la compare souvent à une “grande Suisse”, l’Allemagne va pourtant devoir faire face à de nombreux défis et à une demande accrue d’engagement international, dans un monde chamboulé par l’arrivée de Donald Trump au pouvoir et le Brexit.

“L’Allemagne se trouve aujourd’hui confrontée aux changements venus d’ailleurs, les bouleversements géopolitiques contrarient autant son attirance traditionnelle vers l’Est que son attachement à l’alliance avec les Etats-Unis. Il s’agit d’un changement brutal”, estime Jean-Dominique Giuliani, président de la Fondation Robert Schuman. Avec une poursuite de la coalition avec le SPD, l’Allemagne serait plus ouverte à des réformes ambitieuses en Europe, et moins disposée en revanche à dépenser ou s’engager plus en matière militaire comme le demande Donald Trump. Ce serait l’inverse en cas d’alliance avec les Libéraux.

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