Home Pure Info “Attrape-le!”: bénévoles et chiens traquent les rats new-yorkais

“Attrape-le!”: bénévoles et chiens traquent les rats new-yorkais

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Il est presque minuit, ce vendredi soir, lorsque huit personnes se retrouvent, chacune avec son chien bien-aimé, pour arpenter les ruelles du quartier new-yorkais de Lower East Side. Leur but: tuer autant de rats que possible.

Les chiens, des terriers pour la plupart, tirent sur leur laisse avec impatience, avant de plonger dans des poubelles. Quelques secondes plus tard, ils ressortent avec un rongeur entre les dents.

“Ils sont dressés pour ça. Ils vivent pour ça”, dit Richard Reynolds, responsable de l’association R.A.T.S, acronyme de la Ryders Alley Trencher-fed Society”.

Les rongeurs new-yorkais sont célèbres: la sagesse populaire veut que la première métropole américaine compte autant de rats que d’êtres humains (plus de huit millions). La ville teste régulièrement de nouvelles techniques pour les neutraliser, comme de la glace carbonique ou des bains d’alcool.

Au début de la pandémie, les autorités sanitaires fédérales avaient prévenu de possible “comportement inhabituel et agressif des rongeurs”, la fermeture des restaurants et des bureaux les ayant privés de nourriture.

Cela n’a pas dissuadé les bénévoles de l’association. Leurs battues nocturnes sont simplement devenues moins fréquentes.

– “Super-pouvoirs” –

Leur technique: des chiens à courtes pattes, comme les terriers de chasse, débusquent les rongeurs au milieu des sacs poubelle qui s’empilent le soir sur les trottoirs new-yorkais, ou dans les buissons.

Des chiens aux pattes plus longues, comme les Bedlington terriers, se placent en retrait pour mieux se jeter sur eux lorsqu’ils essaient de s’échapper.

“C’est un peu comme les X-Men”, dit Alex Middleton, dresseur de chiens de 36 ans. “Chaque chien a des super-pouvoirs.”

Pour débusquer les rats, certains, comme Reynolds, 77 ans, frappent d’abord les poubelles avec une barre de métal, tandis que Middleton jette carrément son terrier, nommé Rommel, directement dans les poubelles.

“Vas-y, Rommel, attrape-le!” crie le groupe. Quelques instants plus tard, après quelques couinements, Rommel, la gueule ensanglantée, ressort avec un rat, réjouissant les chasseurs.

Les rongeurs morts sont ramassés par la queue et jetés dans un sac en tissu, puis décomptés en fin de tournée.

Sophia Pierce, qui a rejoint RATS avec son teckel Lita il y a un an, reste impassible devant le massacre des rongeurs.

“On s’habitue. Les gens qui voient ça pour la première fois sont plus sensibles que nous”, dit-elle.

Tout a commencé dans les années 90: Reynolds était à un concours canin dans un parc du New Jersey quand ses chiens se sont mis à tuer des rats. Un employé du parc lui a demandé s’ils pourraient revenir, RATS était né.

L’association intervient à la demande de résidents troublés par la présence de rats dans leur quartier.

La mairie de New York ne soutient pas ses méthodes, estimant que les chiens risquent de contracter la leptospirose. Mais comme elles ne contreviennent pas aux règles sanitaires, elle ne les interdit pas non plus.

“Parfois, quand on fait trop de bruit, on nous jette une cannette de bière, mais la plupart du temps, on est bien accueillis”, dit Reynolds.

Kayla Callender était ravie de voir les chasseurs de RATS intervenir récemment dans son quartier, près du pont de Williamsburg.

“Ça fait une grande différence”, dit-elle. “J’apprécie”.

Mais Stephanie Bell, de l’organisation de défense des animaux PETA, fulmine: pour elle, ces tournées sont “archaïques, dépravées et illégales.”

– “Un autre monde”

Pour Reynolds, tuer les rats avec un chien n’est pas plus cruel que de mettre de la mort-aux-rats ou des pièges collants.

Michael Parsons, expert en rats à l’université de Fordham, compare ces battues à la pose de “pansements sur un cancer”. Limiter les déchets alimentaires et les quantités de poubelles est bien plus efficace, dit-il.

Reynolds reconnaît que RATS ne diminue pas sensiblement la population de rats new-yorkais, mais estime néanmoins “apporter quelque chose à la société”

L’association fournit des échantillons d’ADN pour des recherches universitaires, et des rats congelés à un centre local de secours aux rapaces.

Quant aux bénévoles, ils sont ravis de voir leurs chiens développer leurs instincts de chasseurs.

“On fait de la lutte contre les nuisibles, mais ce n’est pas vraiment pour ça qu’on est là. On est là pour nos chiens, pour qu’ils puissent s’entraîner”, dit Reynolds.

Kim McCormick, une ambulancière qui fait six heures de route depuis le Connecticut pour participer à ces tournées, apprécie aussi la camaraderie au sein du groupe.

“C’est un autre monde, une façon complètement différente de rencontrer des gens. On travaille ensemble et les chiens sont vraiment étonnants ensemble”, dit-elle.

Après trois heures de traque, Greg Conception, 54 ans, aligne au sol les prises de la soirée: 26 rats.

“D’habitude, on en a une quarantaine. C’est un peu léger. On vient clairement trop souvent”, dit-il.

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