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Au Chili, la mobilisation reste forte, nouvelles violences

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Au Chili, la mobilisation reste forte, nouvelles violences

Des dizaines de milliers de manifestants sont une nouvelle fois descendus dans les rues mardi au Chili pour réclamer de profondes réformes sociales au gouvernement, mis sous pression par la persistance des violences.

Alors que plus de 80.000 personnes, selon des chiffres officiels, ont défilé pacifiquement à la mi-journée dans le centre de Santiago à l’appel de plusieurs organisations sociales, des incidents violents se sont multipliées dans la soirée dans la capitale et plusieurs villes du pays.

Dans un scénario devenu habituel, des milliers de personnes se sont réunies en fin d’après-midi sur l’emblématique Plaza Italia, non loin de laquelle des heurts entre manifestants radicaux et forces de l’ordre, déployées en nombre, ont éclaté.

Un restaurant a été incendié et un hôtel pillé, les protestataires allumant un feu de joie avec le mobilier. Les manifestants ont également tenté de pénétrer dans les locaux de l’ambassade d’Argentine au Chili, située à proximité, a indiqué l’ambassadeur José Bordon.

Une église a également été incendiée dans le quartier touristique de Lastarria, dans le centre de la capitale. Des pillages et des affrontements violents ont aussi eu lieu dans d’autres points de la capitale, où de nombreuses barricades ont été érigées.

La mobilisation est restée également forte dans le reste du pays, d’Arica à l’extrême nord, jusqu’à Punta Arenas, à l’extrême sud de ce pays de 18 millions d’habitants.

A Concepcion (sud), les manifestants ont incendié le siège du gouvernement régional, tandis que de nombreux commerces ont été pillés à Viña del Mar et à Valparaiso, siège du Parlement qui a suspendu ses activités pour la journée.

Face à cette nouvelle poussée de violences, le président conservateur Sebastian Pinera a annoncé dans un message à la nation depuis le palais de La Moneda le rappel de policiers retraités pour appuyer les forces de l’ordre.

Il n’a toutefois pas eu recours à l’état d’urgence, comme il l’avait fait à l’éclatement de la crise le 18 octobre, autorisant le déploiement de militaires dans les rues, une première depuis la fin de la dictature d’Augusto Pinochet (1973-1990).

Il a par ailleurs réitéré son appel à un “grand accord national” pour une nouvelle Constitution, mais sans appeler à la convocation d’une Assemblée constituante comme le réclament l’opposition, les organisations sociales et de nombreux manifestants.

– “Une farce” –

Un appel à une “grève générale” dans les secteurs publics avait été lancé pour la journée de mardi par une centaine d’organisations sociales, dont la puissante Centrale unitaire des travailleurs (CUT) et de nombreux syndicats des secteurs de l’éducation, de la santé, des services portuaires et douaniers.

“Il y a beaucoup de mécontentement sur de nombreux sujets (…) l’éducation, la santé, l’exploitation des ressources naturelles. Tout ce qu’a proposé le président est insuffisant, c’est une farce!”, a dénoncé Karen Delgado, une manifestante de 29 ans.

De nombreuses écoles sont restées fermées et les cours dans les universités n’ont pas repris depuis l’éclatement de la crise sociale déclenchée par une hausse du prix du ticket de métro dans la capitale.

Conséquence de la persistance de cette vague de contestation sans précédent dans un pays loué jusque-là pour sa stabilité en Amérique latine, la monnaie chilienne a chuté à un plus bas historique (-3,1%), un dollar s’échangeant à 783 pesos à la clôture des marchés.

Le précédent record à la baisse remontait au 10 octobre 2002, 761 pesos étant alors nécessaires pour obtenir un billet vert. La Bourse de Santiago a également perdu 1,57%.

“C’est un signe d’inquiétude que nous suivons avec beaucoup d’attention”, a réagi le ministre des Finances, Ignacio Briones. La Banque centrale a indiqué qu’une telle baisse était “attendue dans un contexte de plus grande incertitude” en raison de la persistance de la crise.

Près d’un mois après le début de la fronde sociale, la mobilisation ne faiblit pas malgré plusieurs concessions du gouvernement, impensables encore il y a quelques semaines, notamment une modification de la Constitution.

Le gouvernement a aussi conclu deux accords avec l’opposition sur le budget 2020 et pour une réforme fiscale destinés à financer toute une batterie de mesures sociales en faveur des plus modestes.

Mais les syndicats réclament des réformes plus profondes, notamment du système de retraite, totalement privatisé, une hausse du budget de la santé publique et une augmentation du salaire minimum.

Pour tenter de trouver une sortie de crise consensuelle, le chef de l’Etat a également rencontré les ex-présidents de centre-gauche Eduardo Frei (1994-2000) et Ricardo Lagos (2000-2006).

Il s’est aussi entretenu par téléphone avec l’ex-présidente socialiste Michelle Bachelet (2006-2010, 2014-2018), désormais Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l’Homme.

La contestation sociale pèse de plus en plus sur l’économie chilienne. La baisse du PIB en octobre devrait atteindre 0,5%, selon le gouvernement.

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