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Aux Etats-Unis, les restaurants au bord du précipice

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Aux Etats-Unis, les restaurants au bord du précipice

Will a été contraint d’annuler le dîner de son mariage à cause du coronavirus. Il s’est aussi résolu, non sans états d’âme, à demander au restaurant le remboursement intégral de ses frais de peur que l’établissement de Washington ne rouvre jamais.

“Mon projet initial était de constituer une sorte de crédit pour aider le restaurant et de venir y faire la fête plus tard” une fois la pandémie passée, confie le musicien, âgé de 47 ans, qui a requis l’anonymat.

“Mais nous étions inquiets de ne plus revoir cet argent”, a-t-il ajouté alors qu’il est lui-même dans une situation précaire depuis qu’il a perdu son travail dans un magasin de musique de Tenleytown, à Washington et qu’il ne peut plus se produire dans les bars et restaurants.

De nombreux Américains ont multiplié les appels pour venir en aide à leurs restaurants de quartier, en leur achetant par exemple des cartes cadeaux.

C’est “une source de revenus immédiate, particulièrement importante en ce moment pour les petits restaurants locaux”, souligne la Fédération nationale des restaurants.

– Deuxième employeur –

Pour autant, il en faudra bien plus pour sauver cette industrie, vitale à l’économie américaine et deuxième plus grand employeur derrière le secteur de la santé.

Les Etats-Unis comptent plus d’un million de bars, de fast-food et de restaurants.

Avant l’apparition du virus en Chine en décembre, la Fédération tablait sur un chiffre d’affaires de près de 900 milliards de dollars cette année et 15,6 millions d’employés.

La pandémie a fait voler en éclats ses projections. Au total, 40 Etats ont ordonné la fermeture ou des restrictions d’activité aux restaurants. Leur survie est en jeu.

Les économistes de la Fédération ont déjà fait les comptes: si la fermeture devait durer trois mois, le chiffre d’affaires serait amputé de 25%. En outre, 5 à 7 millions de personnes, “au minimum”, perdront leur emploi sans certitude de le retrouver une fois le coronavirus vaincu.

Une enquête menée par cette fédération sur 4.000 restaurants et publiée mercredi montre que 3% des établissements ont fermé définitivement et 11% comptent le faire dans les trente jours.

Les restaurateurs ont réclamé quelque 455 milliards d’aide au gouvernement comprenant un fond d’urgence de 100 milliards, 130 milliards pour payer des allocations chômage et 45 milliards de prêts.

Deux pétitions circulent depuis la semaine dernière, dont une intitulée “Sauver les restaurants d’Amérique” et signée par le célèbre chef Tom Colicchio, très connu du grand public pour animer l’émission Top Chef.

– Peu de marges –

“Les restaurants et les bars sont des contributeurs essentiels et vitaux pour nos communautés”, écrivent les signataires qui étaient jeudi près de 324.600. “Nous sommes au bord de l’extinction”.

En temps ordinaire, “dans le meilleur des cas, les restaurants fonctionnent avec des marges aussi fines que des lames de rasoirs, de l’ordre 3 à 6%, et 90% sont de petites entreprises de moins de 50 employés”, a expliqué à l’AFP Sean Kennedy, vice-président exécutif de la Fédération nationale des restaurants.

Les restaurants qui ont pu rester ouverts luttent pour conserver leurs employés en proposant des services de plats à emporter ou à livrer.

“Mais ce n’est qu’une bouée de sauvetage qui n’est pas viable”, insiste M. Kennedy.

Il a salué l’adoption jeudi au Sénat d’un plan d’aides massives à l’économie, estimant qu’il s’agissait d’une “première étape importante pour aider les restaurants à traverser la tempête”, “à prendre soin de leurs employés et à se préparer” quand le signal de réouverture sera donné.

Il a toutefois relevé “les défis qui attendent l’industrie de la restauration”.

Dès la semaine dernière, M. Kennedy avait adressé une lettre au président Donald Trump, à la présidente démocrate de la Chambre des représentants Nancy Pelosi et au chef de la majorité républicaine au Sénat Mitch McConnell pour demander des aides.

Aujourd’hui, les restaurateurs espèrent que l’aide annoncée va se concrétiser sans délai et sans être ralentie par la bureaucratie.

Alain Roussel, patron du restaurant La Ferme dans le Maryland, qui doit célébrer ses 35 ans d’existence en novembre, a dû se résoudre à suspendre le contrat de ses 38 employés.

“J’ai de la chance, je suis propriétaire des murs et je n’ai pas de dette. Mais je ne peux tenir qu’une paire de mois”, prévient-il néanmoins.

Quant à la réembauche de ses employés, “cela dépendra de la bourse de nos clients”, explique-t-il. “Après la crise financière, l’activité avait repris lentement”.

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