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Birmanie: cessez-le-feu des Rohingyas mais Rangoun refuse de négocier

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Birmanie: cessez-le-feu des Rohingyas mais Rangoun refuse de négocier

Les rebelles rohingyas, dont des attaques contre la police fin août avaient déclenché la répression de l’armée, ont déclaré dimanche un cessez-le-feu unilatéral d’un mois, le gouvernement birman répondant qu’il ne négociait pas avec des “terroristes”.

Selon les Nations unies, près de 300.000 personnes, pour la plupart des musulmans de la minorité Rohingya, se sont réfugiées au Bangladesh pour fuir les troubles. Et des milliers d’autres seraient toujours en fuite, cachées dans les forêts ou sur des collines du côté birman, sans vivres ni eau.

C’est sur Twitter que l’Armée du salut des Rohingyas de l’Arakan (ARSA), plus connu localement sous le nom Harakah al-Yaqin (“Mouvement de la foi” en arabe), a annoncé “l’arrêt temporaire de ses opérations militaires offensives”. L’ARSA a ajouté vouloir ainsi favoriser l’arrivée de l’aide humanitaire.

L’ARSA a appelé la Birmanie a faire également une “pause humanitaire”. “Nous ne négocions pas avec les terroristes”, a répondu sèchement dans un tweet dimanche Zaw Htay, conseiller du gouvernement birman.

Dimanche, le ministre des affaires étrangères du Bangladesh, A.H. Mahmood Ali, a dénoncé un “génocide” en cours dans l’Etat Rakhine (sud-ouest de la Birmanie), bouclé et interdit d’accès à la presse et aux organisations internationales depuis le début des violences.

– ‘Tout a été détruit’ –

La Maison Blanche s’est de son côté déclarée lundi “profondément troublée”, sans pour autant pour mettre en cause le gouvernement birman dirigé de facto par Aung San Suu Kyi.

Dans un camp improvisé près de Shamlapur, au Bangladesh, les réfugiés rohingyas doutaient eux que ce cessez-le-feu puisse être pour eux synonyme de retour dans leur village.

Les soldats birmans “nous disent +Partez ou bien nous allons tous vous brûler+. Comment peut-on croire qu’un cessez-le-feu ait le moindre effet”, explique à l’AFP Hafez Ahmed, 60 ans.

Et pour beaucoup, il ne reste plus rien: “Je n’ai plus rien là-bas, plus de maison, plus de village. Tout a été détruit”, renchérit Hashem Ullah, un fermier rohingya.

Samedi, pour la première fois, la Birmanie a promis la mise en place de camps pour accueillir les musulmans rohingyas déplacés.

Environ 27.000 bouddhistes et hindous ont également fui leurs villages et ont trouvé refuge dans les monastères et les écoles dans le sud de la région.

Les troubles ont débuté le 25 août avec les attaques coordonnées de plusieurs dizaines de poste-frontières birmans par les rebelles rohingyas, équipés de simples machettes et couteaux.

Le groupe, qui avait déjà revendiqué des attaques en octobre, dit avoir pris les armes pour défendre les droits bafoués de la minorité rohingya. D’après l’armée birmane, près de 400 d’entre eux auraient été tués pendant les combats.

Depuis des décennies, le million de Rohingyas, qui représente la plus grande population apatride au monde, est victime de multiples discriminations en Birmanie, pays à majorité bouddhiste: travail forcé, extorsions et restrictions à la liberté de mouvement.

– ‘Crise immense’ –

La Croix-Rouge au Bangladesh s’est félicitée de la promesse du cessez-le-feu, car les organisations humanitaires sont acculées face à une “crise immense”. “Comment voulez-vous gérer un tel afflux de personnes? Ils veulent un abri, ils veulent un endroit sûr”, a déclaré à l’AFP Misada Said du CICR au Bangladesh.

Pour fuir l’armée birmane, accusée par les réfugiés d’exactions (meurtres, incendie de villages), des centaines de milliers de personnes ont quitté leurs villages du nord de l’Etat Rakhine.

La plupart arrivent au Bangladesh à pied, après des jours de marche sous la pluie, ou en bateau. Les deux pays ont une frontière longue de 278 kilomètres, et un quart de celle-ci est constituée par le fleuve Naf.

Après un long périple sans vivres, les nouveaux arrivés sont souvent malades, affamés et très affaiblis, racontent les ONG. Et au bout du chemin, ils trouvent des camps déjà saturés.

Au total, on estime qu’entre les violences d’octobre, qui avaient poussé 87.000 personnes à fuir, et les troubles actuels, près du tiers des Rohingyas de Birmanie sont désormais au Bangladesh.

“Je crois que cela va être une des pires catastrophes que le monde et la Birmanie aient vu ces dernières années”, s’est inquiétée vendredi la rapporteuse spéciale de l’ONU pour la Birmanie, Yanghee Lee, qui a exhorté Aung San Suu Kyi à “se mobiliser”. Selon elle, plus d’un millier de personnes, essentiellement des Rohingyas, pourraient avoir été tuées dans la région.

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