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Calais, au coeur des relations franco-britanniques depuis près d’un millénaire

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Calais, au coeur des relations franco-britanniques depuis près d’un millénaire

Aux premières loges du Brexit, Calais, voisine maritime de Douvres, est depuis le Moyen-âge très dépendante des relations franco-britanniques, vivant au rythme des conflits et trêves.

– Née d’une position stratégique

Calais nait à la fin du XIIe siècle, au cours d’une vague de fondations orchestrée par les comtes de Flandre, qui entreprennent d’aménager le littoral en pleine révolution des transports maritimes.

Au départ port de pêche, cette ville neuve devient dès le XIIIe siècle, grâce à sa position stratégique, un port international de marchandises. La renommée laine anglaise, support de l’industrie textile flamande, y transite en partie avant d’être tissée dans les villes drapières du continent.

Fortifiée, la cité est aussi en temps de guerre une escale sûre pour la flotte royale et une base navale pour les opérations dirigées contre les anglais, y compris celles menées par les corsaires.

– Un siège et six bourgeois

En 1346, alors que débute la “Guerre de Cent Ans”, le roi d’Angleterre Edouard III vainc la France à Crécy et se rend à Calais, lui infligeant onze mois de siège.

La ville réputée imprenable représente une possible “base militaire avancée pour les expéditions contre la France” et “un moyen de contrôler la Manche”, explique à l’AFP l’historien Stéphane Curveiller, co-auteur d’une “Histoire de Calais” (éditions du beffroi).

Affamée, Calais se rend en 1347. Selon la légende, Edouard III exige alors qu’on lui remette six bourgeois en chemise et corde au cou, prêts à mourir pour les Calaisiens – mais finalement graciés après intervention de la reine. Leur sacrifice, immortalisé par le sculpteur Auguste Rodin, est aujourd’hui un monument de Calais.

– 218 ans d’occupation anglaise

En 1347, les habitants sont chassés et remplacés par des sujets anglais. Nouvelles institutions, monnaie, avantages fiscaux: le roi veut faire de Calais une colonie rentable et recréer une économie. Il impose donc une étape des laines, obligeant les navires à aborder le port, qui sera amélioré grâce aux droits de douane.

Mais la ville est surtout une place militaire, abritant un millier d’hommes souvent rejoints par des renforts, point de départ de nombreuses chevauchées et zone de repli lors des conflits internes. Ville frontière, elle devient un “boulevard diplomatique” qui verra défiler cortèges royaux, ambassadeurs et représentants de l’Eglise au fil des tractations et trêves.

Mais “elle coûte très cher et rapporte peu”, et “vit constamment dans la peur d’une attaque” note l’historien. Pourtant la Couronne anglaise s’y accroche, y voyant l’un de ses “plus précieux joyaux”. Elle sera finalement reprise en 1558.

– Dentelle venue d’Angleterre

Après la révolution et des décennies difficiles, le renouveau économique viendra au XIXe siècle d’une invention anglaise: la dentelle mécanique.

Poussés par l’esprit d’entreprise, des fabricants de Nottingham sortent clandestinement du pays quelques métiers à tulle, un “crime” à l’époque puni de mort. Au départ monopole anglais, l’industrie se développe vite, comptant plusieurs centaines de métiers dès 1830, principalement installés à Saint-Pierre, commune limitrophe aujourd’hui devenue quartier calaisien.

Des innovations technologiques (métiers “Jacquard”, machine à vapeur…) font basculer Calais dans l’ère industrielle. Autour de 1880, plus de 10.000 calaisiens travaillent dans la dentelle, les autres secteurs profitant de l’essor. Si l’industrie déclinera bientôt, elle a largement contribué au développement de Calais.

– Millions de voyageurs transmanche

Parallèlement le port se modernise et développe le transport de passagers. Entre 1850 et 1913 leur nombre est multiplié par huit, pour atteindre 400.000. Le port voit aussi transiter à cette période un million de tonnes de marchandises.

Meurtrie pendant les deux guerres, Calais est reconstruite avec l’aide des britanniques. Ferry-boats et car-ferries reprennent rapidement du service, franchissant le cap du million de passagers en 1958, pour dépasser 8 millions aujourd’hui.

Touché depuis par la désindustrialisation, le chômage et la crise migratoire, le territoire doté de liaisons ferroviaires et routières rapides et du tunnel sous la Manche, doit toujours à ses liens avec l’Angleterre une grande partie de son activité.

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