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Cinq choses à savoir sur l’accord de partage militaire entre Tokyo et Séoul

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Cinq choses à savoir sur l’accord de partage militaire entre Tokyo et Séoul

La décision de la Corée du Sud de mettre fin à un accord de partage de renseignements militaires avec le Japon présente, selon les analystes, des risques géopolitiques et montre que les deux voisins sont loin de venir à bout de leur douloureux passé.

Voici cinq choses à savoir sur la décision du gouvernement sud-coréen.

– Que s’est-il passé ?

Alors que l’on pensait une telle option remisée, la Corée du Sud a annoncé jeudi soir qu’elle ne renouvellerait pas l’Accord sur la sécurité générale des informations militaires (GSOMIA), portant sur le partage de renseignements stratégiques entre les deux nations.

En vertu de ce pacte, signé en 2016, les deux alliés des États-Unis s’étaient donné les moyens de s’échanger directement des secrets militaires, sans passer par les Etats-Unis, notamment au sujet des développements nucléaires et de missiles nord-coréens.

Séoul estime qu’il n’est plus dans son intérêt national de continuer à partager ses données de renseignements avec le Japon, compte tenu de vives tensions bilatérales. Tokyo a protesté “vivement” contre cette décision et exhorté la Corée du Sud à la reconsidérer.

– Pourquoi cet accord est-il important ?

Le ministre japonais de la Défense, Takeshi Iwaya, a publiquement jugé cet accord vital pour la sécurité régionale, jugeant que sa suppression va rendre la coopération bilatérale en matière de défense plus difficile.

Et de rappeler que “lors des séries de lancements de missiles nord-coréens, il y a eu un échange d’informations approfondi et prudent entre les deux parties”.

Les deux armées pourraient avoir plus de difficultés à suivre les lancements de missiles du régime à Pyongyang, abonde Tobias Harris, analyste chez Teneo, d’autant que “cette décision intervient au moment même où la Corée du Nord a intensifié ses tests de missiles balistiques à courte portée”.

D’autres analystes minimisent au contraire la portée de ce geste, soulignant que, avant que l’accord n’existe, le flux d’informations sensibles entre les deux pays était coordonné par les Etats-Unis et que cette pratique pouvait reprendre.

– Quel est l’impact régional et mondial ?

La décision de la Corée du Sud montre que la confiance entre les deux voisins s’est “effondrée”, a écrit dans un commentaire le quotidien Asahi Shimbun, ajoutant que cela ne bénéficierait qu’aux rivaux régionaux de Washington.

“La discorde entre le Japon, les Etats-Unis et la Corée du Sud pourrait être accueillie favorablement par la Chine, la Russie et la Corée du Nord”, indique un éditorialiste du journal.

C’est aussi “un coup dur pour les Etats-Unis, qui ont fait confiance à leurs alliés pour renforcer leur position dans une Asie en rapide mutation”, souligne M. Harris pour qui “cela pourrait entraver les efforts futurs visant à renforcer la coordination entre les Etats-Unis et les autres démocraties de la région”.

– Comment en est-on arrivé là ?

Les deux pays trainent avec eux de nombreux contentieux hérités de la guerre, lorsque, de 1910 à 1945, la Corée du Sud était occupée par le Japon. De récentes décisions de tribunaux sud-coréens exigeant que des sociétés japonaises dédommagent des Sud-Coréens forcés de travailler à l’époque dans leurs usines a rompu la confiance entre les deux pays.

Pour le Japon, cette question était réglée par des accords annexes à la normalisation de leurs relations diplomatiques en 1965.

En retour, le Japon a décidé de durcir les conditions d’exportations de produits sensibles vers la Corée du Sud et depuis c’est l’escalade, jusqu’à cette décision militaire prise mercredi, alors même qu’une semaine auparavant, le président Moon Jae-in avait semblé vouloir apaiser les choses.

– Comment la situation peut-elle évoluer ?

Pour M. Harris, un réchauffement n’est pas pour demain. Il s’attend à “une réduction des échanges commerciaux, des investissements et du tourisme, ainsi qu’à une défiance réciproque persistante”.

L’anti-japonisme continue de croître en Corée du Sud, avec des manifestations et un boycott de produits japonais.

Le Premier ministre nippon, Shinzo Abe, cible des Sud-Coréens en colère, risque d’être sous la pression de la frange nationalistes japonaise réclamant des représailles.

Les États-Unis ont semblé être pris au dépourvu, le secrétaire d’État Mike Pompeo se disant “déçu” par la décision de Séoul, un mot jugé fort par Choi Kang, vice-président de l’Institut d’études politiques Asan, basé à Séoul.

Pour lui, existe aussi le sentiment que “l’administration Trump n’a pas assez joué le rôle de médiateur pour aider les deux parties à trouver un terrain d’entente”.