Home Pure Info Corée du Nord: à la frontière chinoise, l’économie plombée par les sanctions

Corée du Nord: à la frontière chinoise, l’économie plombée par les sanctions

0
Corée du Nord: à la frontière chinoise, l’économie plombée par les sanctions

Usine désertée, restaurants fermés, logements inoccupés: à la frontière nord-coréenne côté Chine, les sanctions de l’ONU contre le programme nucléaire de Pyongyang frappent durement l’économie locale, très dépendante des travailleurs venus de Corée du Nord.

Le phénomène est particulièrement sensible à Dandong (nord-est), la ville frontalière où transite la majeure partie du commerce bilatéral.

Dans une usine textile, les machines à coudre sont à l’arrêt: les couturières nord-coréennes qui y étaient employées ont dû rentrer dans leur pays, en application des sanctions de l’ONU.

Le commerce avec la Corée du Nord a alimenté le boom économique de Dandong, où une zone économique de coopération a même été construite sur les bords du Yalu, le fleuve qui marque la frontière.

Mais l’immense pont à quatre voies édifié pour relier la zone à la rive coréenne n’a toujours pas ouvert, trois ans après la fin des travaux. L’ouvrage a coûté près de 290 millions d’euros.

Pékin, pourtant principal soutien économique et diplomatique de Pyongyang, a voté en 2017 plusieurs séries de sanctions à l’ONU en réponse aux essais nucléaires et tirs de missiles nord-coréens.

“Pour l’économie de Dandong et la vie quotidienne de l’habitant moyen, l’impact se fait clairement sentir”, note Lu Chao, chercheur à l’Académie des sciences sociales de la province du Liaoning (nord-est).

“Le commerce avec la Corée du Nord était un pilier de l’économie locale.”

– ‘Un véritable dieu’ –

Ce sont ces opportunités économiques et le faible coût de la main-d’oeuvre nord-coréenne qui ont attiré à Dandong M. Lin, le patron d’une usine textile.

“Les Nord-Coréens sont disciplinés et travailleurs”, estime l’entrepreneur, qui ne souhaite pas révéler son nom complet. Il avait recruté l’an passé 100 couturières de Corée du Nord, âgées de 18 à 32 ans.

Arrivées le 1er septembre, elles étaient dirigées par un compatriote.

Le contrat signé par M. Lin détaillait leurs conditions de travail: un dortoir propre, trois douches chaudes hebdomadaires et deux créneaux par semaine pour “étudier les politiques et vénérer” le leader nord-coréen Kim Jong-un.

“Ils considèrent leur dirigeant comme un véritable dieu”, raconte le patron.

M. Lin expédiait jadis ses tissus en Corée du Nord, où des couturières locales confectionnaient vestes et manteaux ensuite ré-exportés en Chine. Après de premières sanctions de l’ONU interdisant cette pratique, il avait fait venir des ouvrières nord-coréennes directement à Dandong.

Mais les dernières mesures onusiennes ont ordonné aux travailleurs de Corée du Nord de rentrer chez eux, un désastre pour son usine: elle est aujourd’hui quasi-vide, faute de main-d’oeuvre chinoise compétente et bon marché pour prendre la relève.

Selon lui, sur les 30.000 Nord-Coréens qui travaillaient encore à Dandong en août, 6.000 ont regagné leur pays.

– Singapour et tracteurs –

Une tendance qui se constate dans la zone économique de coopération: la plupart des appartements, vitrines et restaurants y sont déserts.

“Il n’y a rien là-bas”, se désole Yue Yue, employée d’une agence immobilière située à la “Cité Singapour”, un complexe résidentiel haut de gamme. Seuls un tiers des logements ont été vendus, et le prix des autres a dû être baissé de 30%, explique-t-elle.

En application des sanctions de l’ONU, les entreprises nord-coréennes présentes en Chine ont dû fermer courant janvier. Parmi elles, de nombreux restaurants.

Environ 90% des marchandises importées de Corée du Nord sont désormais touchées. Et de nouvelles mesures ciblent les cargaisons faisant le chemin inverse.

Wang Xueliang, qui dirige la société de négoce Dandong Balance, affirme ne plus pouvoir envoyer ses tracteurs, camions et voitures dans le pays voisin.

Avant, il vendait une à deux unités chaque mois à des clients nord-coréens, qui réglaient en yuans ou en dollars. Mais Pékin a interdit début janvier toutes les ventes de véhicules à la Corée du Nord, selon lui.

“Pour le moment, on tourne encore”, explique M. Wang. “Mais l’interdiction a un impact.”

© 2018 AFP. Tous droits de reproduction et de représentation réservés. Toutes les informations reproduites dans cette rubrique (dépêches, photos, logos) sont protégées par des droits de propriété intellectuelle détenus par l’AFP. Par conséquent, aucune de ces informations ne peut être reproduite, modifiée, rediffusée, traduite, exploitée commercialement ou réutilisée de quelque manière que ce soit sans l’accord préalable écrit de l’AFP.