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Costa Rica: peur sur les libertés, en cas de victoire d’un évangéliste

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Costa Rica: peur sur les libertés, en cas de victoire d’un évangéliste

Au Costa Rica, une des nations les plus progressistes d’Amérique latine, la possibilité de voir un pasteur évangéliste devenir président dimanche fait craindre un recul des libertés dans ce pays sans armée vu comme un modèle de démocratie.

Les deux candidats en lice, le conservateur Fabricio Alvarado et l’ex-ministre de centre gauche Carlos Alvarado (sans lien de parenté), sont au coude-à-coude dans les sondages, avec une légère avance pour le premier.

A 43 ans, Fabricio est un ancien journaliste converti à la religion évangélique, qui s’inscrit dans le courant du protestantisme. Cette dernière attire toujours plus de fidèles dans les pays latinoaméricains, traditionnellement catholiques.

Le développement de ces églises, opposées à l’avortement, au mariage gay et à la légalisation de la marijuana, se traduit par une poussée du vote conservateur dans la région, selon les experts.

Le poids du vote évangélique sur le “non” au référendum colombien fin 2016 est une des dernières preuve de l’influence de cette force religieuse en Amérique latine, où ses adeptes dépassent les 30% de la population au Honduras, Guatemala, Nicaragua, Salvador et Puerto Rico, selon le Centre d’investigation Pew, basé à Washington.

Au Brésil, il existe même un “banc évangélique” au Parlement qui compte près de 80 membres et a joué un rôle clé dans la destitution fin août 2017 de la présidente Dilma Rousseff, jugent les experts.

Repéré par le parti Restauration nationale (RN), lié aux églises néo-pentecôtistes, Fabricio Alvarado devient le premier député élu de cette formation, puis leur postulant à la présidentielle.

De manière assez inattendue, ce “petit” candidat, s’est détaché dans les dernières semaines de la campagne du premier tour du peloton de 13 candidats, passant de 3% d’intentions de vote en décembre à 16,9%, fin janvier. Il est finalement arrivé en tête avec 24,9% des suffrages.

Il doit cela à sa position très ferme contre l’union de personnes du même sexe, après une récente décision de justice qui affecte tout le continent.

– “Nous rapprocher de Dieu” –

Le 9 janvier, la Cour interaméricaine des droits de l’homme (CourIDH), institution émanant de l’Organisation des Etats américains (OEA), a exhorté les pays de la région à reconnaître le mariage gay, marquant une évolution majeure en Amérique latine, région où les inégalités sont criantes pour la communauté LGBT.

Bien que non-contraignante, cette décision exerce une pression sur les législations locales. Alvarado s’est dit prêt à retirer son pays de la CourIDH.

Durant la campagne électorale, le candidat évangéliste déclare vouloir modifier le contenu des cours d’éducation sexuelle, transformer l’Institut national de la femme en organisme dédié à la famille et annuler un décret interdisant la discrimination contre les personnes issues de la communauté LGBT dans les institutions publiques.

Il défend aussi la pratique des églises évangélistes qui veulent “soigner” l’homosexualité.

“Au cours de cette élection, c’est la démocratie qui est en jeu, l’éducation et la culture aussi, mais surtout les droits de l’homme”, prévient l’économiste Leonardo Garnier, un ancien ministre de l’Education.

Une crainte pour les libertés confirmée par l’ex-défenseure des droits du Costa Rica Montserrat Solano.

“200 ans après notre indépendance, nous devons décider si nous poursuivons le travail de nos ancêtres de perfectionner, avec les sciences et la raison, une république démocratique et l’Etat de droit (…) ou si nous perdons cet héritage face au dogme et l’exclusion”, a-t-elle écrit sur Twitter.

“Au Costa Rica, nous ne pouvons pas nous permettre de bafouer les droits de l’homme, ni menacer de quitter les cadres légaux internationaux sur lesquels nous nous appuyons”, a jugé de son côté la diplomate costaricaine Christiana Figueres, qui a négocié l’accord de Paris sur le climat.

Le candidat conservateur a voulu prendre ses distances avec cette image en soulignant qu’aucun des membres de son équipe en matière d’économie, de sports et de sécurité n’était un “religieux”.

Mais pour ses partisans, il est celui qui va réconcilier le Costa Rica avec la religion.

“Ce pays s’est beaucoup éloigné de la foi, grâce à Dieu, nous avons Fabrice, lui va nous rapprocher de Dieu”, confie Elizabeth Lopez lors d’un de ses meetings.

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