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De mystérieux “coupeurs de tresses” sèment la panique au Cachemire indien

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De mystérieux “coupeurs de tresses” sèment la panique au Cachemire indien

Une mystérieuse série d’attaques supposées contre une centaine de femmes qui racontent qu’on leur a coupé les cheveux sème la panique et la violence au Cachemire indien.

La véracité des agressions n’est pas confirmée par les autorités et certains parlent d’inventions et de psychose. Mais vraies ou pas, les conséquences n’en sont que trop réelles.

Un homme de 70 ans a été tué par un groupe d’autodéfense depuis le début de l’affaire il y a un mois. Les médias évoquent quasi quotidiennement des bandes qui s’en prennent aux “coupeurs de tresses” supposés.

A la nuit tombée, des hommes armés de barres de fer et de couteaux patrouillent dans la capitale Srinagar et d’autres villes à la recherche de suspects.

Mercredi, cinq personnes ont été blessées quand les soldats ont tiré sur une foule qui jetait des pierres en accusant les troupes de protéger un “coupeur de tresses”.

La police a annoncé vendredi avoir secouru un homme souffrant de “problèmes mentaux” qu’une foule tentait d’immoler par le feu et d’écraser avec un tracteur.

Les autorités ne confirment ni ne démentent les récits des habitantes de cette région himalayenne qui porte les stigmates de décennies de soulèvement contre le règne indien.

Initialement, la police avait accusé les victimes de se couper elles-mêmes les cheveux. Aujourd’hui, elle offre 600.000 roupies (7.800 euros) de récompense pour toute information conduisant à l’arrestation de suspects mais demande aussi aux victimes de se soumettre au détecteur de mensonges.

Dans cette région en majorité musulmane, la plupart des femmes ont les cheveux longs et portent le voile en public.

– ‘Masque noir’ –

Il est difficile de vérifier la réalité des agressions. Les témoins sont rares.

Tasleema explique avoir été attaquée en allant chercher des légumes dans le garde-manger.

Son mari, Mohammad Rauf Wani, raconte à l’AFP avoir entendu un cri et retrouvé sa femme gisant au sol inconsciente, 15 centimètres de cheveux coupés à son côté.

“Je ne comprends pas ce qu’il s’est passé”, dit-il, brandissant la tresse.

“Quelqu’un a essayé de m?étrangler par derrière. J’ai vu son visage recouvert d’un masque noir. J’ai vu ses yeux. Puis, je ne sais pas”, déclare Tasleema à l’AFP.

La plupart des femmes étaient seules au moment des attaques supposées. Elles ont raconté avoir été rendues inconscientes par un gaz avant que leurs cheveux ne soient tranchés. La plupart ont moins de 18 ans et sont issues de familles pauvres, selon la police.

Au Cachemire où le moindre incident peut devenir politique, les groupes d’autodéfense font leur miel de l’absence d’explication officielle ou d’arrestations.

Des vidéos qui montrent des proches accuser la police et l’armée tout en brandissant des tresses coupées tournent sur les réseaux sociaux.

Les médecins de l’unique hôpital psychiatrique du Cachemire expliquent que les autorités ne leur ont pas demandé d’intervenir.

– Problèmes mentaux –

“Certains évoquent une hystérie collective. Mais, compte tenu de mon expérience et de la manière dont se produisent (les attaques), je ne le crois pas”, déclare pour sa part Mohammad Maqbool Dar, directeur du département psychiatrique à l’université médicale du gouvernement de Srinagar.

Des chefs séparatistes et des habitants accusent “des agents du gouvernement” d’être les auteurs pour répandre la peur et détourner l’attention de la lutte pour un Cachemire indépendant ou un rattachement avec le Pakistan.

Les cadres de la police ont peur d’une aggravation des troubles dans une région déjà traumatisée par la rébellion séparatiste et la contre-insurrection déclenchée par les autorités indiennes, qui ont fait des dizaines de milliers de morts.

D’après une étude réalisée en 2015 par Médecins sans frontières (MSF), environ 1,8 million d’adultes, soit 45% de la population adulte du Cachemire, pour la plupart des femmes, souffrent de stress post-traumatique et d’autres problèmes mentaux.

Des attaques similaires ont été dénoncées en juillet dans les Etats septentrionaux d’Uttar Pradesh et d’Haryana et autour de New Delhi. Les autorités locales les ont traitées comme des crimes tout en faisant appel à des psychiatres.

“Ici, la situation est différente”, dit à l’AFP Munir Ahmed Khan, haut responsable de la police locale. “Il y a des forces qui vont exploiter (ces affaires) jusqu’à la lie. Le Pakistan va se servir de la situation, c’est mon inquiétude”.

Sous pression, le gouvernement du Cachemire se borne à souligner que les “motivations” font l’objet d’une enquête.

La ministre en chef Mehbooba Mufti a dénoncé sur Twitter une tentative de “créer l’hystérie collective et de porter à atteinte à la dignité des femmes de l’Etat”.

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