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Emmanuel Macron au Tchad : la crise en Centrafrique au coeur de la discussion avec Idriss Déby

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Emmanuel Macron se rend ce week-end au Tchad, où il abordera notamment avec son homologue Idriss Déby la crise centrafricaine, a annoncé l’Élysée. Paris et N’Djamena s’inquiètent de la hausse de l’influence russe dans le pays.

C’est un allié de longue date que s’apprête à rencontrer Emmanuel Macron à N’Djamena, dimanche 23 décembre. À l’occasion de sa première visite au Tchad, le président doit s’entretenir avec son homologue au sujet des différentes crises auxquelles fait face ce pays du Sahel. Emmanuel Macron vient également chercher l’appui d’Idriss Déby pour contrer l’influence russe grandissante en République centrafricaine.

Depuis décembre 2017, Moscou fournit des armes aux Forces armées de la Centrafrique (Faca). Près de 175 instructeurs russes, dont cinq militaires principalement employés par des entités privées, ont été envoyés dans le pays pour former deux bataillons de Faca. Le Kremlin s’est également assuré une bonne position grâce à Valerii Zakharov, nommé conseiller à la présidence centrafricaine en matière de sécurité nationale.

Moscou a aussi lancé des négociations avec les troupes rebelles ex-Séléka et a tenté, sans succès, d’organiser en juillet dernier une rencontre entre le gouvernement centrafricain et des groupes armés dans la capitale soudanaise, Khartoum.

“La France craint d’être supplantée par la Russie”

La France voit d’un très mauvais œil ces activités russes dans ce qu’elle considère encore être sa chasse gardée. “La France craint d’être supplantée par la Russie auprès du gouvernement centrafricain”, affirme Thierry Vircoulon, chercheur associé au centre Afrique de l’Ifri, interrogé par France 24.

Pour le chercheur, la stratégie russe en Centrafrique est à comparer – “toute proportion gardée” – à celle déployée en Syrie. “[La Russie] y déploie des appuis militaires en faveur du gouvernement en place, essaye de faire de la médiation en faveur de la paix et donc devient une solution au conflit”, explique-t-il.

>> À lire : En Centrafrique, une présence armée russe de plus en plus marquée

Face à cela, la France cherche à regagner en influence dans le pays. Pour y parvenir, Emmanuel Macron pourrait demander à son homologue tchadien d’utiliser ses relations avec certains groupes armés centrafricains pour les inciter à se montrer plus ouverts à la négociation avec le gouvernement.

Selon Roland Marchal, chercheur au CNRS, joint au téléphone par France 24, “Paris craint également que les Russes travaillent à leurs propres intérêts économiques, et notamment à cultiver leurs contacts et relations avec les groupes armés dans le but de sécuriser les sites [miniers] qu’ils exploitent – au détriment d’une amélioration de la situation sécuritaire”.

Qu’elle soit motivée par des intérêts diplomatiques ou économiques, cette forme de légitimation des groupes armés inquiète Paris. Les Français redoutent qu’elle mène à une nouvelle crise majeure dans le pays et dans la région. Une préoccupation partagée par le Tchad voisin. N’Djamena redoute donc que les mouvements rebelles tchadiens ne trouvent en Centrafrique de nouveaux soutiens.

>> À voir : L’Entretien de France 24 avec Jean-Yves Le Drian : “La Centrafrique n’est pas un terrain de jeu”

Menaces des rebelles tchadiens

Selon Roland Marchal, “des sources fiables affirment que des contacts ont eu lieu entre des opposants armés à Idriss Déby et le président centrafricain [Faustin-Archange] Touadéra depuis le printemps. On évoque aussi des contacts établis au Soudan entre Russes et rebelles tchadiens.”

Une situation d’autant plus préoccupante pour Idriss Déby que si “rejoindre N’Djamena depuis la Libye au nord, ou bien le Soudan à l’est, n’a rien d’un parcours de santé, la capitale tchadienne est bien plus accessible par le sud depuis la frontière centrafricaine”, précise Roland Marchal.

Paris comme N’Djaména ont intérêt à contenir l’influence russe en Centrafrique mais aussi à éviter toute nouvelle flambée de violences, sans pour autant s’engager véritablement pour une résolution de la crise. “Le Tchad ne veut pas trop de problèmes sur sa frontière et la France ne veut pas être de nouveau sollicitée pour une opération militaire”, résume Thierry Vircoulon.