Pétain sera-t-il honoré ou pas? Cette question qui entoure l’hommage aux huit (ou sept? ou cinq?) maréchaux de France, prévu samedi prochain aux Invalides, ne trouve pas de réponse tranchée. Et pour cause, les déclarations du président de la République et de son équipe gouvernementale se suivent et, parfois, se contredisent.

La controverse est née à la fin du mois d’octobre. Il est alors question que l’état-major des armées rende hommage aux huit maréchaux de la Première guerre mondiale. Or, parmi eux figure le maréchal Pétain, à l’origine de la Collaboration avec les nazis et du régime de Vichy. Le 30 octobre sur notre antenne, Florence Parly, la ministre des Armées se veut catégorique: “L’état-major n’a jamais imaginé rendre hommage au maréchal Pétain”, seulement aux cinq maréchaux enterrés aux Invalides, assure-t-elle, ce qui n’est pas le cas de Pétain.

Les huit maréchaux célébrés?

C’était sans compter sur l’intervention d’Emmanuel Macron ce mercredi 7 novembre. Devant les caméras, le chef de l’Etat en déplacement mémoriel dans l’Est rappelle que le Maréchal Pétain a été “un grand soldat” avant de faire des “choix funestes” pendant la Seconde guerre mondiale. Le président déclare qu’il est dès lors “légitime” de rendre hommage au maréchal Pétain, rappelant que la Grande guerre “est aussi une victoire de l’armée française et de ses maréchaux, il est normal de les célébrer”.

Il semble alors que, finalement, tous les maréchaux soient inclus dans la cérémonie organisée ce samedi 10 novembre. Les Décodeurs du journal Le Monde soulignent d’ailleurs que le programme national commémoratif du centenaire prévoit une “cérémonie d’hommage aux maréchaux de la Grande Guerre à l’Hôtel national des Invalides”, lors de laquelle “il s’agira de rendre hommage aux huit maréchaux qui ont dirigé les combats pendant la Première guerre mondiale”.

Ce premier programme, disponible en ligne au départ, étant aujourd’hui introuvable sur le site du centenaire, Les Décodeurs se sont empressés de le retrouver dans les archives du web. La rédaction de BFMTV avait conservé un exemplaire de ce premier programme, où il est possible de retrouver le passage affirmant que huit maréchaux seraient concernés par l’hommage.

“Aucun hommage ne sera rendu à Pétain”

La déclaration d’Emmanuel Macron, très critiquée, est expliquée en conférence de presse le mercredi par Benjamin Griveaux, porte-parole du gouvernement. “Je ne rentrerai pas dans cette mauvaise polémique”, a déclaré Benjamin Griveaux, appelant à ne pas faire de “raccourcis douteux. Pétain a servi la patrie en 14 et l’a trahie en 40”. Il a ensuite cité une phrase du général de Gaulle sur Pétain: “Sa gloire à Verdun ne saurait être contestée ni méconnue par la Patrie”.

Ce jeudi, il revient sur le sujet. Benjamin Griveaux publie sur son compte Facebook une tribune, concédant que s’il y avait eu confusion, “c’est que nous [le gouvernement] n’avions pas été suffisamment clairs sur ce point.” Il écrit alors: “Aucun hommage ne sera rendu à Pétain samedi. Il n’en a jamais été question. Nous avions annoncé que nous honorerions les maréchaux de la Grande Guerre. Certains en ont déduit que Pétain en faisait partie; ce n’est pas le cas.” 

Selon le porte-parole, les précédents propos d’Emmanuel Macron n’appelaient pas à une célébration de Pétain, mais à rappeler “une vérité historique”.

La tombe de Pétain ne sera pas fleurie

L’Élysée a, de son côté, confirmé que la tombe du Maréchal Pétain au cimetière de l’Île d’Yeu, en  Vendée, ne serait pas fleurie.

Emmanuel Macron insiste d’ailleurs jeudi sur le fait qu’il “n’a jamais été question d’avoir une célébration individuelle” pour l’ancien chef du régime collaborationniste de Vichy. Or, ce qui lui a été reproché n’a jamais été l’organisation d’une célébration individuelle, mais d’un hommage global incluant le maréchal Pétain.

Il ajoute ensuite que son chef d’état-major ira samedi “fleurir la tombe des cinq maréchaux qui sont aux Invalides où il n’y a pas Pétain”. Une déclaration appuyée mercredi soir par une publication de l’état-major des armées pour la cérémonie du 10 novembre. Il y est écrit noir sur blanc que le chef d’état-major rendra hommage seulement aux cinq maréchaux des Invalides: Foch, Lyautey, Maunoury, Fayolle et Franchet d’Espèrey.

Épisode ultime de la controverse ce jeudi midi. Interrogé dans les Hauts-de-France par des médias, Emmanuel Macron pointe leur rôle dans l’imbroglio:  “Ce qui était une erreur à mon avis c’est d’en faire une polémique comme vous l’avez fait”, déclare-t-il, avant d’ajouter que “le pays a besoin d’autre chose que de la boîte à folie dans laquelle vous êtes collectivement installés”.