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Jérusalem: Washington célèbre son ambassade et passe sous silence les violences

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Jérusalem: Washington célèbre son ambassade et passe sous silence les violences

L’administration américaine a ostensiblement célébré lundi l’inauguration de son ambassade à Jérusalem tout en passant sous silence les manifestations que cette décision controversée de Donald Trump a provoquées dans la bande de Gaza et leur répression par Israël.

Malgré l’envoi d’une délégation sans poids lourds à la cérémonie d’ouverture de la nouvelle ambassade, Washington n’a pas caché sa joie face à la concrétisation de cette promesse emblématique de la reconnaissance unilatérale de Jérusalem comme capitale d’Israël, annoncée le 6 décembre par le président américain dans un choeur de réprobation internationale.

C’est un “grand jour pour Israël”, a lancé sur Twitter Donald Trump.

“Aujourd’hui, grâce au leadership du président, nous célébrons l’histoire en marche”, a renchéri son vice-président Mike Pence.

La Maison Blanche a distribué à la presse un communiqué soulignant comment le président républicain tient ainsi un engagement de campagne de manière “rapide et efficace”, contrairement à tous ses prédécesseurs qui s’étaient rangés, une fois au pouvoir, à la tradition diplomatique et au consensus international.

Et au sein de la classe politique américaine, y compris chez certains démocrates, on applaudit cette décision qui a été interprétée comme un geste envers la base électorale, notamment évangéliste, du duo Trump-Pence.

Ce ton enjoué tranche avec les images des manifestations sanglantes dans la bande de Gaza contre l’inauguration de l’ambassade, lors desquelles, pendant que se déroulait la cérémonie à Jérusalem, plusieurs dizaines de Palestiniens ont été tués par les forces israéliennes.

Alors que les capitales européennes ont appelé au “calme” et à la “retenue” pour “prévenir un nouvel embrasement”, les Etats-Unis ont clairement décidé de ne pas s’attarder sur ces protestations.

Dans un communiqué publié alors que le bilan dépassait déjà les 40 morts, le secrétaire d’Etat américain Mike Pompeo n’a fait aucune mention à ces violences, préférant “célébrer l’ouverture de l’ambassade”.

Lors de précédentes manifestations dans l’enclave palestinienne ces dernières semaines, réprimées dans le sang par l’Etat hébreu, la diplomatie américaine a “déploré la perte de vies humaines” mais a surtout mis l’accent sur “le droit d’Israël à se défendre”.

– “Plan Kushner” –

Interrogé lundi matin par l’AFP sur ces nouvelles violences, le département d’Etat n’a pas fait de commentaire.

Seul le gendre de Donald Trump et conseiller présidentiel Jared Kushner, présent à la cérémonie à Jérusalem, a semblé faire allusion aux manifestations en accusant “ceux qui provoquent les violences” de faire “partie du problème, pas de la solution”.

En revanche, les responsables américains ont tous réaffirmé leur soutien au processus de paix entre Israël et les Palestiniens, et même leur conviction que la décision de Donald Trump aiderait à faire progresser la résolution du conflit.

“Nous restons déterminés à promouvoir une paix globale et durable entre Israël et les Palestiniens”, a déclaré, sans plus de précisions, Mike Pompeo. “En reconnaissant enfin Jérusalem comme capitale d’Israël, les Etats-Unis ont choisi les faits au détriment de la fiction. Et les faits sont les seules vraies fondations pour une paix juste et durable”, a ajouté Mike Pence.

Le président américain s’était engagé à relancer un processus de paix moribond, promettant même d’arracher un accord définitif. Il a confié cette délicate mission à Jared Kushner, qui a entamé les négociations avec les parties et devait, selon plusieurs sources, dévoiler début 2018 un plan de paix tenu secret.

Mais l’annonce du 6 décembre sur Jérusalem a mis fin aux tractations. Ulcérés, les dirigeants palestiniens refusent désormais de parler aux négociateurs américains.

Et le “plan Kushner” n’a jamais été présenté, à tel point que plusieurs diplomates étrangers doutent même qu’il ait jamais existé.

“La décision de déplacer l’ambassade américaine à Jérusalem en l’absence d’une négociation plus vaste, sans rien demander à Israël en retour ni impliquer les Palestiniens”, revient à infliger à la région un remède qui aggrave son état, estime le président du think tank Council on Foreign Relations, Richard Haass.

Mais bien qu’ils réaffirment leur attachement au processus de paix, les responsables américains semblent ne plus en faire une priorité, toute leur politique au Moyen-Orient tournant autour du dossier iranien.

“L’administration Trump peut avoir le sentiment qu’elle a le soutien de certains gouvernements arabes”, moins pressés que par le passé de soutenir les Palestiniens, note Hady Amr, de la Brookings Institution. Mais ce soutien arabe risque de “ne pas se matérialiser” tant que les violences perdurent à la frontière entre Gaza et Israël, prévient-il.

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