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L’Allemagne lève un coin de voile sur l’extrême droite dans la police

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L’Allemagne lève un coin de voile sur l’extrême droite dans la police

Inventaire avant le grand ménage? Le gouvernement allemand a dévoilé mardi un état des lieux inédit de la présence de l’extrême droite dans les forces de sécurité, un motif de “honte” mais pas un “problème structurel”.

Les scandales se sont en effet multipliés ces derniers mois, avec la mise au jour de plusieurs groupes de policiers échangeant des propos racistes. Dans l’armée, un commando d’élite noyauté par des néo-nazis a été en partie dissous cet été.

“Chaque cas avéré est une honte pour l’ensemble des forces de sécurité”, a déclaré le ministre de l’Intérieur, le conservateur bavarois Horst Seehofer, lors d’une conférence de presse.

Les services de renseignements dénombrent, selon les chiffres dévoilés mardi, quelque 377 cas d’extrémistes de droite dans les forces de sécurité, dont 319 dans la police, soit une petite minorité au sein des 300.000 membres des forces de l’ordre. Ces données portent sur la période allant de janvier 2017 à mars 2020.

Il n’y a “aucun réseau d’extrême droite au sein de la police fédérale”, a de son côté souligné son dirigeant, Dieter Romann.

– Pressions –

Ces chiffres ont conforté le ministre, accusé en Allemagne de ne pas vouloir faire complètement la lumière sur ces dérives, dans sa conviction que les idées extrémistes ne sont pas un “problème structurel” au sein des forces de l’ordre.

S’il a présenté ce rapport des services de renseignements, M. Seehofer rechigne toujours à mener des investigations trop poussées, pour éviter de jeter l’opprobre sur l’ensemble les “99% de policiers qui respectent” la Constitution.

Des régions ont cependant annoncé qu’elles pourraient diligenter leurs propres investigations pour combler ce vide.

La pression s’est en effet accrue ces derniers mois, y compris de la part du parti social-démocrate, partenaire des conservateurs au sein de la coalition d’Angela Merkel, pour faire la lumière sur l’ampleur réelle de ces groupes.

Le chef de l’Etat, Frank-Walter Steinmeier, une autorité morale en Allemagne, a lui-même appelé fin septembre à combattre “plus résolument” les réseaux d’extrême droite dans le pays.

La porosité entre l’extrême droite et une partie de la police est pourtant avérée. Le parti Alternative pour l’Allemagne (AfD) est ainsi le groupe au Bundestag qui compte dans ses rangs le plus d’agents de police – 5 sur 89.

– Menaces de mort –

Plusieurs affaires récentes, que les investigations du gouvernement n’ont pas pu intégrer dans le décompte, ont suscité l’indignation en Allemagne, où le terrorisme d’extrême droite est érigé au premier rang des menaces pesant sur la sécurité du pays.

En Rhénanie du Nord-Westphalie, la région la plus peuplée d’Allemagne, une trentaine de policiers, suspendus depuis, échangeaient sur la messagerie Whatsapp des photos d’Adolf Hitler et de croix gammées, ainsi que des drapeaux du IIIe Reich et un montage montrant un réfugié dans une chambre à gaz d’un camp de concentration.

Un groupe similaire a été démantelé fin septembre à Berlin.

En juillet, les enquêteurs avaient annoncé l’interpellation d’un ancien policier et de son épouse soupçonnés d’avoir envoyé des mails de menaces à des responsables politiques et des personnalités publiques dans toute l’Allemagne.

Leurs messages étaient signés “NSU 2.0”, une référence au groupuscule néonazi allemand dont les membres ont commis une dizaine d’assassinats racistes pendant la décennie 2000 et ont bénéficié de la passivité coupable de policiers.

L’été a aussi été marqué par la démission d’un responsable régional de la police allemande en raison de liens supposés entre ses services et l’extrême droite.

L’affaire faisait suite à la découverte de l’utilisation d’un ordinateur de la police de l’Etat régional de Hesse, où se trouve Francfort, pour trouver des données privées sur les personnes ayant fait l’objet de menaces de mort et d’insultes de la part de l’ultra-droite par courrier ou emails.

L’armée est elle aussi concernée. Le KSK, un commando d’élite, a ainsi été en partie dissous avant l’été. Une vingtaine de ses membres étaient soupçonnés d’appartenir à la mouvance néo-nazie, une proportion cinq fois plus élevée que dans l’ensemble de la Bundeswehr, selon le service de contre-espionnage allemand.

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