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Le Patriarche Filaret, champion de l’indépendance religieuse de l’Ukraine

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Le Patriarche Filaret, champion de l’indépendance religieuse de l’Ukraine

Le Patriarche ukrainien Filaret, qui était l’un des principaux dirigeants de l’Église orthodoxe russe sous l’URSS, est devenu à la chute de celle-ci le champion de l’indépendance religieuse de l’Ukraine, au point de se faire excommunier par Moscou.

Aujourd’hui, l’ecclésiastique de 89 ans est la figure religieuse la plus influente dans son pays, réhabilité en octobre par le Patriarcat de Constantinople. Il espère désormais diriger la nouvelle Eglise ukrainienne unifiée et indépendante de la tutelle russe.

Filaret, ou Mykhailo Denysenko de son vrai nom, est né en 1929 dans la région de Donetsk dans l’est de l’Ukraine. Elle est aujourd’hui sous le contrôle de séparatistes prorusses, à la suite d’un conflit qui a fait plus de 10.000 morts.

Il décide se mettre au service de l’Église après la mort de son père, tué au cours de la Seconde guerre mondiale. Il étudie en Ukraine, à l’époque république soviétique, et à Moscou, avant une ascension brillante au sein du clergé.

En 1968, il est nommé métropolite de Kiev, devenant le premier Ukrainien ethnique à occuper ce poste en 150 ans. Un poste dans lequel il n’a pas pu échapper à une collaboration plus ou moins étroite avec le KGB, à une époque où le clergé était soumis à un contrôle intense de la part des autorités communistes.

En 1990, un an avant la dissolution de l’Union soviétique, il est l’un des prétendants à la fonction suprême, celle de Patriarche de l’Église orthodoxe russe. Mais il échoue face à Alexis II.

Après l’indépendance de l’Ukraine un an plus tard, il entame une campagne de longue haleine pour que l’Église orthodoxe ukrainienne, qui se trouve sous la tutelle spirituelle de Moscou depuis 1686, obtienne également sa liberté.

Il proclame ainsi en 1992 un Patriarcat de Kiev indépendant dont il prend la tête, ce qui lui vaut d’être excommunié par Moscou cinq ans plus tard. Ce Patriarcat et son statut ne sont alors reconnus par aucune autre Église orthodoxe dans le monde.

– Religion et politique –

“J’avais décidé que le temps était venu pour l’Église ukrainienne de devenir totalement indépendante de Moscou”, se remémore-t-il lors d’un entretien avec l’AFP.

Ses critiques l’accusent d’avoir une famille en secret et d’avoir été un collaborateur actif du KGB, comme de nombreux autres ecclésiastiques, qui ne pouvaient obtenir de positions dirigeantes dans l’Église sans l’aval des services secrets.

Filaret a affirmé à l’AFP que le KGB avait menacé de le fusiller dans les années 1950, mais qu’il a refusé de fournir des renseignements. “Je leur ai dit: vous pouvez me fusiller, je n’ai pas peur. Peu importe si je meurs maintenant ou dans ma vieillesse”.

Il ne masque pas ses grandes ambitions, et ne s’est jamais détourné de la politique.

En 2014, il a soutenu le soulèvement populaire du Maïdan à Kiev, qui a abouti à la destitution et à la fuite en Russie du président Viktor Ianoukovitch. Son Église fournissait alors un abri aux manifestants face à la police anti-émeute.

Après l’annexion de la péninsule ukrainienne de Crimée par la Russie en mars 2014 et le déclenchement d’un conflit meurtrier avec des séparatistes prorusses dans l’Est, Filaret a clamé que le président Vladimir Poutine était possédé par le Diable et l’a comparé à Hitler.

La reconnaissance en octobre par le Patriarcat de Constantinople d’une Église indépendante en Ukraine lui permet désormais de réaliser son rêve. Malgré son âge avancé, il souhaite présenter sa candidature pour diriger la nouvelle Eglise orthodoxe unifiée, dont la formation reste encore à faire.

“Tant que Dieu me donne la force, je servirai l’Église”, affirme-t-il.