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Le prêche en chansons: pendant le ramadan, l’Indonésie a un incroyable talent

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Le prêche en chansons: pendant le ramadan, l’Indonésie a un incroyable talent

C’est le moment de vérité pour Puteri Ara, lycéenne indonésienne de 16 ans revêtue du hijab qui rappe avec son groupe sur la tolérance religieuse pour une émission de télévision.

Pourront-ils l’emporter sur les rivaux d’un boys band qui chantent à la gloire de dieu, ou sur un groupe de filles qui demandent aux téléspectateurs d’adorer le prophète Mahomet plutôt que les stars de la K-pop sud-coréenne?

Les audiences de la téléréalité du mois du jeûne du ramadan sont à des sommets en Indonésie, le pays musulman le plus peuplé du monde.

“Les musulmans qui font le jeûne doivent être prêts à se tenir aux côtés de ceux qui ne jeûnent pas”, chante Puteri Ara. “C’est mon pays, il est fondé sur des religions différences mais nous sommes unis dans la paix”.

L’émission Syiar Anak Negeri (“les enfants du pays prêchent”), pour partie dédiée à la recherche de jeunes talents et pour partie aux sermons, n’est qu’une parmi de nombreux programmes du genre diffusés pendant le ramadan. On y voit des enfants, y compris de trois ans, viser la gloire télévisuelle.

En jeu, on trouve aussi des prix, dont les billets pour La Mecque, la ville sainte la plus sacrée de l’Islam, des sommes d’argent pouvant aller jusqu’à 100 millions de roupies (6.000 euros) ou des bourses d’études universitaires.

Le groupe de Puteri, trois filles et deux garçons, a répété sans relâche un morceau qui mêle rap, box et nasheed, chant local déclamé a cappella ou sur fond d’instruments à percussions.

– “Bonne parole” –

Le jury, qui comprend des célébrités mais aussi des représentants du ministère des Affaires religieuses et de la plus haute instance musulmane du pays, décide qui va franchir les étapes.

Syiar Anak Negeri est le bébé du producteur Feri Setiawan, qui veut préserver les jeunes des tentations de l’alcool, de la drogue et de l?extrémisme.

“Avec cette émission, on espère qu’ils vont développer un état d’esprit et des valeurs positifs”, dit-il. “Et on est sûrs que lorsqu’ils vont rentrer dans leurs villes respectives, ils vont porter la bonne parole à l’école, dans le voisinage ou au moins à la maison”.

La réputation de tolérance religieuse de l’Indonésie a une nouvelle fois été mise à l’épreuve le mois dernier avec une série d’attentats à la bombe contre des églises dans lesquels une dizaine de paroissiens ont été tués.

L’Indonésie est en butte de longue date à l?extrémisme islamiste. En 2002, les attentats de Bali, la pire attaque terroriste subie par le pays, avaient fait plus de 200 morts, pour la plupart des touristes étrangers.

– Prédicateurs à problèmes –

Les attaques contre les églises perpétrées par deux familles de kamikazes ravivent les craintes de voir le radicalisme gagner du terrain.

Les tenants de la ligne dure gagnent du terrain politiquement. Face à ce constat et surfant sur la demande d’émissions d’inspiration religieuse, les producteurs de télévision diffusent ces programmes à des millions de téléspectateurs durant le ramadan. Les soap et caméras cachées jadis dominants se retrouvent relégués au second plan.

Mais la porte s’est également ouverte pour les prédicateurs radicaux qui en profitent pour se répandre sur les ondes afin de prôner l’intolérance contre les femmes, les groupes minoritaires et les non musulmans.

“On a vu pas mal de prédicateurs posant problème, des sexistes et des extrémistes”, dit Muhamad Heychael, analyste à Remotivi, qui surveille les médias.

Mais ils ne sont pas les bienvenus sur Syiar Anak Negeri et les soutiens de l’émission pensent qu’elles est susceptible de jouer un rôle de contre-pouvoir.

“C’est une solution pour faire pièce à l’extrémisme et à l’intolérance”, dit Nanang Syaikhu, professeur au département communication à l’Université islamique d’Etat de Jakarta.

Dans le studio d’enregistrement, le message de paix de Puteri n’a pas suffi. Le groupe est en larmes mais ne renonce pas à ses idéaux.

“En tant que jeune génération, nous ne devons pas diviser la gens en disant +Oh, celui-là c’est un musulman, celui-là c’est un non musulman+ et échanger constamment des insultes”, explique la jeune fille à l’AFP.

“Nous sommes différents mais nous vivons dans le même pays. Nos différences vont nous unir”.

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