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Le “shutdown”, un classique de la vie politique américaine

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Le “shutdown”, un classique de la vie politique américaine

Les États-Unis sont entrés samedi dans une situation de “shutdown”, une fermeture des services administratifs fédéraux en raison d’un désaccord entre le président Donald Trump et le Congrès. Décryptage.

Cette année, les vacances de Noël sont avancées pour des centaines de milliers de fonctionnaires américains. Faute de compromis entre le Congrès et la Maison Blanche sur le financement d’un mur à la frontière mexicaine dans le budget fédéral, plusieurs administrations fédérales sont en situation de “shutdown”, une fermeture partielle.

“Nous négocions avec les démocrates sur la sécurité aux frontières dont nous avons absolument besoin (gangs, drogues, trafic d’êtres humains et plus) mais ça pourrait durer longtemps”, a prévenu samedi en fin de matinée le président américain, qui a différé son départ en vacances en Floride.

Dans la journée de samedi, les négociations pour résoudre la situation avant Noël ont été interrompues :  “Le Sénat se réunira pour une session technique lundi, le 24. La prochaine session plénière prévue est le 27 décembre”, a déclaré le sénateur républicain, Mitch McConnell, chef de file des Républicains au Sénat.

Ces discussions budgétaires sont traditionnellement difficiles. Elles s’achèvent souvent par des textes de financement temporaire du gouvernement. Mais, régulièrement, le bras-de-fer se transforme en “shutdown”.

Qu’est-ce que le “shutdown” ?

En anglais,  “shutdown” veut dire fermeture. Concrètement, c’est une mesure prévue par la Constitution américaine lorsque le Congrès ne parvient pas à voter le Budget. Le gouvernement américain est alors en incapacité de payer son administration. Les fonctionnaires qui ne sont pas essentiels sont mis au chômage technique et les agences fédérales sont paralysées.

Quelles sont les conséquences?

Depuis 0H01 samedi, certaines administrations ne sont plus financées et ont dû réduire leurs activités. Environ 800 000 fonctionnaires ont été mis en congé sans solde ou, pour les services jugés essentiels, forcés de travailler sans être payés.

La fermeture partielle affecte des ministères importants comme la Sécurité intérieure, la Justice, le Commerce, les Transports, le Trésor ou l’Intérieur, qui gère les parcs nationaux très visités pendant les fêtes, comme le Grand Canyon.

“Quelques zones des parcs nationaux sont accessibles mais les accès pourraient changer sans avertissement”, a mis en garde le ministère sur son site Internet.

La Statue de la Liberté va toutefois rester ouverte au public grâce au financement de ses opérations par l’État de New York. “Le parc reste ouvert pour accueillir les visiteurs venus de tout le pays et du monde entier”, indique son site internet.

De son côté, l’agence de supervision du transport aérien américain (FAA) a assuré sur Twitter que le trafic aérien était “pleinement opérationnel” et que le blocage n’avait “pas d’effet sur la sécurité” des passagers.

Pourquoi maintenant ?

Le président américain réclame 5 milliards de dollars pour financer la construction d’un mur à la frontière avec le Mexique, censé bloquer l’immigration clandestine, promesse-phare de sa campagne en 2016. Mais un budget voté par la majorité républicaine à la Chambre des représentants a été bloqué au Sénat.

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Avec seulement 51 sièges sur 100 à la Chambre haute, les républicains ne disposent pas des 60 voix nécessaires pour l’adoption d’une loi budgétaire. Et ils ne peuvent pas compter sur un appui des démocrates qui dénoncent un “mur médiéval”.

Donald Trump a fait pression sur le chef de file des républicains au Sénat, Mitch McConnell, pour recourir à l'”option nucléaire” : un vote à la majorité simple au Sénat, ce qui aurait été une rupture avec les traditions du Sénat. Cependant Mitch McConnell a refusé catégoriquement

Le temps joue contre Donald Trump. En effet, les démocrates seront de nouveau majoritaires à la Chambre basse du Congrès le 3 janvier après leur victoire électorale de novembre. Le milliardaire espère donc obtenir le financement de sa promesse. En vue, l’élection présidentielle de 2020 où le milliardaire aimerait être capable de se présenter comme quelqu’un qui tient ses promesses pour tenter d’être réélu.

Quels précédents ?

Depuis 1977, c’est le 20e “shutdown”, le troisième cette année. Le premier avait duré trois jours en janvier et le second seulement quelques heures en février, les discussions avaient déjà échoué à cause de la question migratoire.

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L’administration Obama avait aussi connu les affres de la fermeture partielle. Le “shutdown” d’octobre 2013 avait duré 16 jours et plus de 800 000 fonctionnaires et agents fédéraux avaient été mis en congé d’office. Il avait été entraîné par des désaccords concernant l’Obamacare, la réforme de l’assurance maladie, entre la chambre des représentants contrôlée par les républicains et le Sénat aux mains des démocrates. Les républicains de la Chambre des représentants avaient refusé de voter un budget qui ne supprimerait pas le financement de la réforme de l’assurance-maladie.

Le plus long “shutdown” a eu lieu pendant 21 jours durant le mandat de Bill Clinton. Le bras de fer a opposé les républicains, au pouvoir au Congrès, et le président démocrate concernant des coupes dans les dépenses de protection sociale. À l’époque, 280 000 fonctionnaires avaient été mis au chômage et 475 000 n’avaient pas été payés. Le Congrès avait ensuite remboursé les jours de chômage technique. Le coût de cette paralysie avait été estimé à 1,4 milliard de dollars (environ 2 milliards aujourd’hui). Alors que le camp républicain avait été jugé responsable de cette pagaille, Bill Clinton avait été facilement réélu quelques mois plus tard.

Cependant, dans l’histoire des États-Unis, c’est Ronald Reagan qui détient le nombre record de “shutdown” avec huit durant ses deux mandats (1981-1989). Le plus long a duré trois jours en 1983 et concernait des tensions par rapport aux budgets. La chambre des représentants avait alors augmenté le budget à l’éducation, mais réduit ceux de la défense et de l’aide internationale, ce qui avait mené à un désaccord avec le Président Reagan.