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Le Soudan en quête de stabilité un an après la chute de Béchir

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Le Soudan en quête de stabilité un an après la chute de Béchir

Un an après la chute d’Omar el-Béchir, déposé par l’armée sous la pression de la rue, le Soudan est toujours en quête de stabilité et son gouvernement de transition au chevet d’une économie en lambeaux.

Le 11 avril 2019, après quatre mois de manifestations populaires dans tout le pays, l’armée mettait fin à 30 ans d’un règne tyrannique.

Le dictateur Omar el-Béchir, qui avait pris le pouvoir en 1989 par un coup d’Etat, a depuis été condamné une première fois pour corruption en décembre et se trouve aujourd’hui sous les verrous à Khartoum.

Un haut responsable du nouveau pouvoir s’est aussi engagé en février à ce que M. Béchir soit remis à la Cour pénale internationale (CPI), plus d’une décennie après son inculpation pour des crimes contre l’humanité au Darfour, mais cette perspective demeure floue.

Depuis août 2019, après un long bras de fer entre la contestation et l’armée, un Conseil souverain composé de civils et de militaires supervise la délicate transition vers un régime civil.

Les défis de cette période de trois ans correspondent “à la même constellation de facteurs qui a contribué à la chute de Béchir”, explique Magdi al-Gizouli, chercheur au Rift Valley Institute.

Parmi ces défis, il cite “la refonte de l’ordre politique”, la “crise économique dévastatrice” et le “prix du maintien de la paix sociale”.

Une profonde crise économique sévit au Soudan, qui peine à se relever de trois décennies de gestion désastreuse.

Dans un pays où le triplement du prix du pain avait déclenché la révolte fatale à M. Béchir fin 2018, les difficultés économiques mettent toujours en péril la stabilité politique.

– Levée de sanctions-

En août 2019, le Soudan s’est doté d’un gouvernement de technocrates à la suite d’un accord de partage du pouvoir entre l’armée et les principales figures de l’opposition.

Un ex économiste de l’ONU, Abdallah Hamdok, a été nommé Premier ministre.

Parmi la multitude de défis auquel il fait face figurent une inflation annuelle autour de 70%, une dette publique colossale et les négociations de paix avec les rebelles du Darfour (ouest).

Ce conflit, qui a éclaté en 2003 entre forces gouvernementales et insurgés issus de minorités ethniques, a fait environ 300.000 morts et plus de 2,5 millions de déplacés, selon l’ONU.

En 2011, le pays, qui souffrait déjà de sévères sanctions américaines, a dû encaisser un nouveau coup dur avec la sécession du Soudan du Sud, riche en ressources pétrolières.

Les Etats-Unis ont annoncé en octobre 2017 la fin de l’embargo économique imposé depuis 20 ans au Soudan et l’annonce faite par Washington en mars de la levée des sanctions sur 157 entreprises soudanaises a redonné au gouvernement l’espoir d’attirer les investissements étrangers.

– “La route sera longue” –

Mais le pays demeure sur la liste noire américaine des Etats soutenant le terrorisme, même si une des conditions de son retrait a été remplie cette semaine avec un accord d’indemnisation des familles des victimes de l’attentat contre le destroyer USS Cole en 2000 au Yémen.

Malgré les quelques avancées, les perspectives économiques demeurent moroses.

Coupures de courant et pénuries sont fréquentes et les Soudanais font souvent la queue plusieurs heures pour acheter du pain ou de l’essence.

“La route de la reprise économique sera longue et nécessitera le soutien réfléchi, prolongé et coordonné des bailleurs traditionnels tels que l’Union européenne, le Royaume-Uni, le Japon, les Etats-Unis et les Etats du Golfe”, estime Jonas Horner, du centre de réflexion International Crisis Group (ICG).

M. Hamdok, qui a effectué sa première visite à Washington en décembre, a déployé des efforts considérables pour redorer l’image du Soudan à l’étranger.

Et les autorités ont donc accepté l’idée de remettre M. Béchir, sous mandat d’arrêt pour génocide et crimes de guerre au Darfour, à la CPI de La Haye.

Mais de telles mesures sont “controversées” au Soudan “surtout auprès des personnes proches de l’ancien régime”, selon Marina Ottaway, chercheuse au Wilson Center.

– Flambées de violence –

Ces derniers mois, la transition politique a aussi été mise à rude épreuve par plusieurs incidents sécuritaires, dont une tentative d’assassinat non revendiquée du Premier ministre le mois dernier.

Les suspects potentiels sont “innombrables”, commente Mme Ottaway qui évoque le mécontentement face à la détérioration de la qualité de vie après le renversement de M. Béchir.

Le Darfour et d’autres régions subissent encore des épisodes de violence communautaire, même si les autorités ont amorcé de fastidieuses négociations de paix avec les groupes rebelles des Etats du Kordofan-Sud et du Nil Bleu.

Le ministre de l’Information Fayçal Saleh a récemment assuré que “beaucoup de progrès” avaient été réalisés avec les rebelles. “Les problèmes qui subsistent ne sont pas énormes mais ils sont complexes.”

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