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Les universités sud-africaines sous haute tension

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Les universités sud-africaines sous haute tension
des étudiants manifestent sur le campus de l'Université de Witwatersrand à Johannesburg, le 21 octobre dernier.

AFP – Tensions raciales, inégalités économiques, manque de logements étudiants: les universités sont de nouveau en ébullition en Afrique du Sud, avec trois établissements fermés jeudi pour cause de violences, quatre mois après un gigantesque mouvement estudiantin qui avait fait reculer le gouvernement.

Mercredi soir, plusieurs bâtiments de l’Université du Nord-Ouest (nord), dont un laboratoire de sciences, ont été incendiés volontairement et détruits par des étudiants en colère. La police a dû disperser les manifestants à coups de balles en caoutchouc et de gaz lacrymogène.

À l’origine de la colère des étudiants, la constitution d’un conseil estudiantin dont les manifestants contestent la légitimité de l’élection. À la suite de ces incidents qui ont provoqué des dégâts évalués à plusieurs centaines de milliers d’euros, l’un des trois campus de l’université, celui de Mahikeng, a été «fermé jusqu’à nouvel ordre».

des étudiants manifestent sur le campus de l'Université de Witwatersrand à Johannesburg, le 21 octobre dernier.
Des manifestations avaient déjà eu lieu en Octobre 2014 sur le campus de l’Université de Witwatersrand à Johannesburg. AFP

Le président sud-africain Jacob Zuma a dénoncé jeudi cette nouvelle vague d’incidents dans les facultés. «L’incendie de bâtiments universitaires au moment où nous faisons de l’éducation une priorité pour notre jeunesse est inexplicable et ne peut en aucun cas être toléré», a-t-il réagi dans un communiqué.

«La colère aussi grande soit elle ne devrait pas pousser des étudiants à brûler leur propre université et à priver les autres d’éducation», a-t-il estimé. Deux autres universités sud-africaines sont aussi actuellement fermées à la suite d’incidents. En début de semaine, l’Université de Pretoria a été le théâtre de heurts entre étudiants noirs et blancs, lors d’une manifestation pour dénoncer l’enseignement en afrikaans, la langue de la minorité blanche qui a instauré l’apartheid.

L’essentiel des cours à l’Université de Pretoria sont cependant dispensés en anglais, s’est défendue la vice-chancelière, Cheryl de la Rey, alors que des discussions sont en cours entre la faculté et les étudiants.

La question de la langue est extrêmement sensible en Afrique du Sud, où les violentes émeutes de Soweto en 1976 contre l’enseignement en afrikaans avaient marqué un tournant dans la lutte contre le régime ségrégationniste de l’apartheid, qui a officiellement pris fin en 1994.

Cocktail Molotov

L’Université du Free State, à Bloemfontein (centre), a également fermé ses portes après des incidents raciaux sur fond de revendications sociales lundi soir lors d’un match de rugby sur le campus.

Des manifestants noirs avaient envahi la pelouse, poursuivis par des spectateurs blancs. Ces étudiants soutiennent les employés pauvres de l’université de Bloemfontein – majoritairement noirs – qui demandent la fin du recours aux prestataires de services pour le nettoyage ou la sécurité du campus.

Enfin au Cap, Max Price le vice-chancelier de l’Université UCT a exprimé jeudi son «dégoût» après que des étudiants ont jeté des excréments sur le campus.

«Non seulement jeter des excréments pose un dangereux risque sanitaire mais c’est aussi un affront à notre humanité», a-t-il indiqué. La semaine dernière son bureau avait été endommagé par un cocktail Molotov. En cause: le manque de logements pour les étudiants.

L’Afrique du Sud connaît un regain de tensions raciales sur fond de profond malaise social, 22 ans après la fin de l’apartheid. Malgré des progrès réels, les inégalités persistent entre la majorité noire, qui compte 28 % de chômeurs, et la minorité blanche, où 10 % de la population est sans emploi.

Les facultés sud-africaines sont en fait sous très haute tension depuis près d’un an, quand le mouvement «Rhodes must fall» (Rhodes doit tomber) a éclaté.

La campagne menée avec succès en avril par les étudiants d’UCT s’était soldée par le déboulonnage, sur le campus, de la statue du colonisateur britannique Cecil John Rhodes, homme politique et magnat minier éminemment raciste. Le mouvement était chargé de symboles: avant d’être démontée, la statue avait été maculée d’excréments puis recouverte de sacs-poubelle. Les étudiants y voyaient un symbole de l’oppression exercée par la minorité blanche jusqu’en 1994.

En octobre, un mouvement estudiantin national cette fois, pour dénoncer l’augmentation des frais de scolarité, avait paralysé les universités. Il avait calqué son slogan sur celui de la campagne anti-Rhodes: «Fees must fall» (les frais doivent tomber).

Là aussi, les étudiants en étaient sortis victorieux: après plusieurs jours de heurts, notamment devant le Parlement, le gouvernement avait cédé en gelant l’augmentation des frais pour l’année 2016.

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