L’offensive de l’armée syrienne et de ses alliés entrait lundi dans sa «phase finale» à Alep-Est, que les civils continuaient de fuir par milliers tandis que les dernières forces rebelles étaient assiégées dans un réduit.
Le régime de Bachar al-Assad a repris tôt lundi matin le grand quartier de Cheikh Saïd, dans le sud-est de la ville, selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), alors que des frappes aériennes et des tirs d’artillerie visaient toujours un secteur encore contrôlés par la rébellion.
Ancienne capitale économique de la Syrie, Alep était coupée en deux depuis juillet 2012, entre l’est tenu par les rebelles et l’ouest sous contrôle gouvernemental.
Mais une offensive foudroyante de l’armée syrienne, lancée à la mi-novembre avec le soutien de combattants iraniens et du Hezbollah libanais et accompagnée de violents bombardements aériens et d’artillerie, a chassé les rebelles de l’essentiel du territoire qu’ils contrôlaient dans la cité.
Un correspondant de l’AFP, qui pouvait entendre les bombardements depuis le secteur ouest, a estimé qu’il s’agissait des plus intenses depuis plusieurs jours.
Un responsable militaire à Alep a affirmé à l’AFP que l’opération «entrait dans sa phase finale», précisant que les insurgés ne tenaient plus que 10% de leur ancien territoire.
«Le secteur encore contrôlé par l’opposition est très réduit et pourrait tomber à tout moment puisque les rebelles ne gardent le contrôle total que de deux quartiers: Al-Machad et Soukkari», a indiqué à l’AFP le directeur de l’OSDH Rami Abdel Rahmane.
La perte d’Alep serait le pire revers essuyé par la rébellion depuis le début du conflit en 2011 et permettrait au régime de contrôler les cinq plus grandes villes de Syrie.
«Sérieuses inquiétudes»
Plus de 10 000 civils supplémentaires ont fui les quartiers rebelles d’Alep ces dernières 24 heures pour rejoindre des secteurs sous contrôle gouvernemental, selon l’OSDH.
Au total, environ 130 000 civils ont quitté les quartiers de l’opposition depuis le début le 15 novembre de la vaste offensive du régime, d’après la même source.
L’agence officielle Sana a indiqué que plus de 3500 personnes avaient quitté lundi ce secteur de la ville et qu’ils avaient été 8000 à le faire la veille.
«Il y a de sérieuses inquiétudes pour les civils restés dans les quartiers tenus par la rébellion, qui seraient plusieurs milliers», a indiqué le directeur de l’OSDH, M. Abdel Rahmane.
Le conflit en Syrie, déclenché en 2011 par la répression sanglante de manifestations pro-démocratie pacifiques, s’est transformé en une guerre complexe impliquant une multitude d’acteurs syriens et étrangers.
D’après l’OSDH, le groupe Etat islamique (EI) a exécuté lundi huit combattants pro-régime à Palmyre, une ville du centre du pays que les jihadistes ont reprise dimanche neuf mois après en avoir été chassés par l’armée syrienne et son allié russe.
Selon la même source, les jihadistes avançaient lundi au sud et à l’ouest de la ville et menaient des combats violents contre l’armée syrienne près de la ville d’Al-Qaryataïne alors que les avions russes poursuivaient leurs frappes aériennes contre eux.
La semaine dernière, les jihadistes avaient lancé une offensive dans le désert de la province centrale de Homs, capturant des champs pétroliers et des positions gouvernementales.
L’EI avait pris en mai 2015 le contrôle de la ville classée au patrimoine mondial de l’Humanité, où il avait détruit ou endommagé une partie des ruines antiques, avant d’en être chassé en mars dernier.
«Situation dramatique»
En cinq ans, la guerre en Syrie a fait plus de 300 000 morts et déplacé plus de la moitié de la population.
L’offensive du régime à Alep depuis la mi-novembre a tué plus de 415 civils selon l’OSDH, tandis que 130 civils ont été tués par des tirs rebelles sur les quartiers ouest.
«Je n’ai jamais vu une situation aussi dramatique que celle que vivent les enfants d’Alep», confiait dimanche Radoslaw Rzehak, chef du bureau du Fond des Nations unies pour l’enfance (Unicef) dans la cité dévastée.
Les efforts diplomatiques pour mettre fin à ce conflit dévastateur n’ont jamais porté leurs fruits.
La semaine dernière, la Russie affirmait que des négociations étaient en cours avec des responsables américains pour imposer un cessez-le-feu à Alep et obtenir le retrait des forces rebelles.
Mais aucune annonce concrète n’a encore eu lieu et la perte attendue d’Alep-Est est «politiquement très importante» car elle va «briser l’opposition armée», estimait Yezid Sayigh, expert au Centre Carnegie Moyen-Orient.
Parallèlement, «l’idée que le régime puisse être renversé militairement est (maintenant) définitivement abandonnée», selon lui.
Source : AFP