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RDC: Saint-Sylvestre sous haute tension à Kinshasa

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RDC: Saint-Sylvestre sous haute tension à Kinshasa

La République démocratique du Congo va vivre une Saint-Sylvestre à hauts risques avec des marches ce dimanche matin après la messe à l?appel des catholiques contre le prolongement du pouvoir du président Joseph Kabila.

Ces “marches pacifiques” ont d?ores et déjà été interdites par les autorités qui laissent planer la menace d?une riposte implacable, sous le regard inquiet des chancelleries.

Dans la nuit de samedi à dimanche, des soldats avaient pris position devant certaines églises de Kinshasa.

Ces marches ont été convoquées par les catholiques d?un “comité laïc de coordination”.

Les organisateurs demandent au président Kabila de déclarer publiquement qu’il ne sera pas candidat à sa propre succession.

Ils souhaitent aussi un “calendrier électoral consensuel” à la place de l?actuel, qui prévoit des élections le 23 décembre 2018 pour remplacer le président Kabila, dont le dernier mandat a pris fin le 20 décembre 2016.

A Kinshasa, la capitale aux 10 millions d?habitants, les fidèles sont invités à sortir dans la rue, bibles, crucifix et chapelets à la main, après la messe qui commencera dès l?aube, vers 06h00 du matin (05h00 GMT).

“Il n?y aura pas de marche. Toute personne qui tentera de marcher va trouver la police sur son chemin”, a prévenu le chef de la police de Kinshasa, Sylvano Kasongo.

Il s?appuie sur la décision du gouverneur de Kinshasa, André Kimbuta, qui a interdit ces marches. Le gouverneur estime que les organisateurs ne lui ont pas communiqué d?itinéraires précis et qu?il ne dispose pas d?effectif policier suffisant pour encadrer les marcheurs.

– ‘Un droit constitutionnel’ –

“Nous marcherons parce que c?est un droit constitutionnel”, a répondu un porte-parole des organisateurs, affirmant que la “hiérarchie catholique a soutenu la marche”.

La très puissante conférence épiscopale (Cenco) tout comme le représentant du Vatican en RDC n?ont pas soutenu officiellement ces marches mais ne les ont pas rejetées non plus. “Aucun évêque ne condamne cette marche”, aurait fait savoir l?épiscopat d?après le site d?information Diacenco.

Cette marche sera suivie de près par la Mission des Nations unies au Congo (Monusco) et par les chancelleries qui demandent en vain au régime de Kinshasa de respecter la liberté de réunion et de manifestation pacifique.

“L?UE, les Etats membres, la Monusco et les collègues de la communauté internationale observeront attentivement les événements de demain (dimanche) en RDC”, a tweeté le délégué de l?Union européenne à Kinshasa, Bart Ouvry.

– Des arrestations la veille –

Cette marche a été précédé par les arrestations vendredi d?une douzaine de militants du mouvement citoyen Lutte pour le changement (Lucha) dans le Kasai.

Samedi soir, cinq militants du mouvement citoyen Filimbi ont été présentés à la télévision d?État par le chef de la police anti-émeute, le général Ilunga Muyoyo. Il les accuse d’avoir incité à “l’insurrection” alors qu’ils mobilisaient les jeunes d’un quartier populaire de Kinshasa pour la marche de dimanche.

Cette marche a reçu le soutien de tous les opposants au président Kabila, du Rassemblement de l?opposition au candidat déclaré en exil Moïse Katumbi en passant – fait plus rare – par le célèbre gynécologue Denis Mukwege.

Les précédents appels de l?opposition à des rassemblements interdits avaient été un échec (le 19 décembre) ou avaient rencontré un succès mitigé (30 novembre).

Le 30 novembre, une personne avait été tuée et des dizaines d?autres arrêtées et blessées au cours de la dispersion des manifestations dans tout le pays.

La Saint-Sylvestre n?est pas une date anodine. Il y a un an jour pour jour, l?épiscopat parrainait un accord majorité-opposition prévoyant des élections au plus tard en décembre 2017.

La commission électorale a finalement renvoyé ces élections au 23 décembre 2018, estimant que les violences dans le Kasai avaient retardé le recensement.

L?opposition refuse ce nouveau calendrier et demande le départ de Joseph Kabila dès ce 31 décembre 2017, estimant que les accords de la Saint-Sylvestre ne lui accordaient une légitimité que jusqu?à ce jour.

– Défi frontal –

Au pouvoir depuis 2001, M. Kabila a été élu en 2006 et en 2011. Son deuxième et dernier mandat a expiré le 20 décembre 2016.

La Constitution lui interdit de briguer un nouveau mandat mais lui permet de se maintenir au pouvoir jusqu?à l?installation d?un successeur élu.

En septembre 2016 et décembre 2016, la répression des manifestations demandant des élections et le départ de M. Kabila avaient fait des dizaines de morts.

Ce n’est pas la première fois que l?Église ou ses fidèles défient frontalement le pouvoir dans l’histoire agitée de la RDC, pays de 70 à 90 millions d’habitants très majoritairement chrétiens.

Il y a 25 ans, en février 1992, le même “comité laïc de coordination” avait organisé une marche contre la dictature du maréchal Mobutu, accusé de ne pas vouloir reprendre les travaux d’une “conférence nationale” supposée libéraliser le régime.

La répression qui avait suivi avait causé la mort de plusieurs dizaines de manifestants.

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