L’Arabie saoudite cherche à serrer les rangs face à l’Iran, son grand rival, en accueillant à partir de jeudi des dirigeants arabes et musulmans pour trois sommets en pleines tensions dans le Golfe.
Parmi les leaders arrivés à La Mecque (ouest) figure le Premier ministre du Qatar, cheikh Abdallah ben Nasser Al-Thani, premier responsable qatari de ce rang à se rendre en Arabie saoudite la rupture le 5 juin 2017.
Ryad et trois de ses alliés (Emirats arabes unis, Bahreïn et Egypte) avaient alors rompu avec le Qatar, accusé de soutenir des groupes extrémistes et à qui ils reprochaient son rapprochement de l’Iran. Doha a nié soutenir des extrémistes et accusé ces quatre pays de chercher un changement de régime au Qatar.
Les Etats-Unis, alliés à la fois de Ryad et de Doha, ont salué la participation du Qatar aux réunions de La Mecque. Washington n’a cessé depuis deux ans de tenter des médiations pour régler cette crise qui nuit à sa stratégie d’isolement de l’Iran.
A La Mecque, la première ville sainte de l’islam, drapeaux et panneaux géants de bienvenue ornent les rues en attendant la tenue en soirée des sommets de la Ligue arabe et du Conseil de coopération du Golfe (CCG) et, vendredi soir, de l’Organisation de la coopération islamique (OCI).
Il s’agira de réunions nocturnes en raison du mois de jeûne du ramadan dans la journée, alors que des centaines de milliers de fidèles sont à La Mecque pour prier. Les autorités ont bloqué six avenues.
D’emblée, le ministre saoudien des Affaires étrangères, Ibrahim al-Assaf, a une nouvelle fois fustigé l'”ingérence” iranienne, après des accusations du conseiller américain à la sécurité nationale, John Bolton selon lesquelles l’Iran est vraisemblablement derrière les actes de sabotage du 12 mai contre des pétroliers au large des Emirats.
Selon des analystes, l’Arabie saoudite sunnite veut isoler son rival chiite iranien, sur fond de guerre psychologique entre l’Iran et les Etats-Unis qui ont renforcé leur déploiement militaire dans la région face selon eux aux “menaces” iraniennes.
– “Mines navales” –
“Le soutien de Téhéran aux rebelles Houthis au Yémen est la preuve de l’ingérence iranienne dans les affaires des autres nations et c’est quelque chose que les pays islamiques devraient rejeter”, a dit M. Assaf, dont le pays intervient militairement contre les rebelles au Yémen.
Il s’exprimait lors d’une réunion mercredi soir des ministres des Affaires étrangères des 57 membres de l’OCI à Jeddah, près de La Mecque.
Reza Najafi, directeur général des questions de paix internationale et de sécurité aux Affaires étrangères, a représenté l’Iran à cette réunion préparatoire de l’OCI, dont Téhéran est membre.
Selon M. Assaf, il faut réagir avec “fermeté et détermination” au sabotage le 12 mai de deux pétroliers saoudiens, et d’un bateau norvégien et autre un émirati au large du port de Fujairah, à l’entrée du Golfe. John Bolton a attribué ces attaques à “des mines navales, très vraisemblablement d’Iran”.
Jeudi, Brian Hook, émissaire américain pour l’Iran, a indiqué que le résultat des enquêtes menées par plusieurs pays sur ces sabotages serait connu bientôt.
– “Désirs diaboliques” –
“Nous cherchons assurément un changement dans l’attitude du régime” iranien, a ajouté M. Hook.
L’Iran a rejeté comme “risibles” les accusations de John Bolton, perçu comme le principal instigateur de la politique américaine d’extrême fermeté face à l’Iran.
“M. Bolton et les autres bellicistes qui recherchent le chaos devraient savoir que la stratégie de patience, la grande vigilance et la préparation défensive optimale de l’Iran empêcheront la réalisation de leurs désirs diaboliques dans la région”, ont dit les Affaires étrangères.
Les tensions régionales se sont exacerbées depuis que l’administration Trump a inscrit en avril les Gardiens de la Révolution iraniens, armée idéologique du régime iranien, sur sa liste noire d'”organisations terroristes” et renforcé en mai les sanctions économiques contre Téhéran après avoir quitté, il y a un an, l’accord international sur le nucléaire iranien.
Elles sont encore montées de plusieurs crans après les sabotages et la multiplication de tirs de drones par les rebelles yéménites sur des cibles saoudiennes, dont deux stations de pompage d’un oléoduc le 14 mai.