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Serbie: élections législatives dans l’ombre de l’homme fort de Belgrade

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Serbie: élections législatives dans l’ombre de l’homme fort de Belgrade

Les Serbes votaient dimanche lors d’élections législatives qui devraient conforter le parti au pouvoir du président Aleksandar Vucic, sorti renforcé de la crise du coronavirus face à une opposition fracturée dont une partie boycotte le scrutin.

Ces premières élections nationales en Europe depuis le confinement imposé par la pandémie se déroulent dans l’ombre présidentielle. Aleksander Vucic ne se présente pas mais son nom figure sur les bulletins en tant que patron du Parti serbe du progrès (SNS, centre droit) au pouvoir depuis huit ans.

Les partis d’opposition qui boycottent les législatives expliquent que des élections libres sont impossibles du fait de la distorsion du paysage médiatique et démocratique.

Jelena Djikanovic, économiste de 39 ans, fait partie des électeurs critiques qui n’ont pas tenu compte de leur appel.

“Le boycott n’est pas productif car le pays est à la dérive. J’ai mon favori, j’espère un changement”, dit-elle à l’AFP après avoir glissé son bulletin dans l’urne. “Je suis fatiguée d’attendre des jours meilleurs”.

Miodrag Protic, technicien de 51 ans, a voulu exercer ses prérogatives démocratiques. “Les partis doivent nous présenter leurs programmes et à nous (électeurs) de choisir”.

L’opposition, que rien ne rapproche sinon la détestation d’Aleksandar Vucic, est minée par les dissensions. Les partis principaux boudent le scrutin mais une vingtaine de petites formations participent.

– Inégalités –

Le suspense n’est guère au rendez-vous.

D’après des enquêtes récentes, le SNS devrait rafler plus de 50% des suffrages.

La Constitution confère au président un rôle honorifique mais Aleksandar Vucic est sans conteste celui qui prend les décisions. Le nom du futur Premier ministre, en cas de victoire, n’a pas été annoncé. Les affiches électorales ne sont pas siglées SNS mais proclament: “Aleksandar Vucic pour nos enfants”.

Les analystes parlent de “système autoritaire concurrentiel”. “On a une concurrence mais les protagonistes ne sont pas égaux”, déclare à l’AFP Dusan Spasojevic, professeur de sciences politiques à l’université de Belgrade.

Le parti au pouvoir bénéficie d’un paysage médiatique dominé par la presse progouvernementale, et d’une vaste base électorale constituée d’employés du service public et de leurs proches, soulignent les analystes.

La principale inconnue reste le taux de participation, entre les peurs liées au coronavirus et les appels ironiques des partisans du boycott demandant aux électeurs de “maintenir leur distanciation sociale vis-à-vis des bureaux de vote”. A 12H00 (10H00 GMT), elle était estimée par l’ONG indépendante CRTA à environ 18%, soit un niveau similaire aux législatives de 2016.

Le chef de l’Etat, deux fois Premier ministre, assure que le boycott constitue la vraie menace pour la démocratie. Il accuse l’opposition de s’en servir comme feuille de vigne pour cacher son impopularité.

A 50 ans, le président est plus populaire que jamais selon des sondages. Il émerge renforcé d’une crise sanitaire ayant contraint le pouvoir à une campagne virtuelle.

Si les contaminations repartent à la hausse avec le déconfinement, la Serbie a évité, avec quelque 260 morts, les scénarios catastrophe vécus ailleurs. Et pour ces élections initialement prévues en avril, des gants et des masques sont proposés dans les bureaux de vote.

Au delà de la gestion de la pandémie, le président plaît à ceux qui le jugent proche du peuple.

“Il a trouvé la manière de parler au nom des gens pauvres, moins éduqués, qui vivent dans des endroits où il n’y a pas des masses d’opportunités”, poursuit Dusan Spasojevic.

Le chef de l’Etat peut compter sur des soutiens de poids sur la scène internationale. Outre la Chine et la Russie, Aleksandar Vucic est soutenu par l’Occident qui le considère comme capable de résoudre le différend de la Serbie avec le Kosovo, son ancienne province dont elle refuse de reconnaître l’indépendance.

En campagne, le président a mis avant les projets d’infrastructures et promis par exemple de quasi doubler le salaire moyen à 900 euros d’ici 2025.

“Je crois que (Vucic) mérite d’être soutenu”, juge Radojko Sovrlic, ingénieur de 58 ans. “Il a fait des routes, des tunnels, des ponts, des maternelles (…) pas mal de choses”.

Environ 6,5 millions d’électeurs, y compris la diaspora, sont appelés à voter jusqu’à 18H00 GMT. Les premiers résultats sont attendus quelques heures plus tard.

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