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Soudan du Sud: Salva Kiir, homme de l’indépendance et de la guerre civile

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Soudan du Sud: Salva Kiir, homme de l’indépendance et de la guerre civile
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Ancien chef militaire devenu dirigeant politique presque à son corps défendant, le président Salva Kiir a mené le Soudan du Sud à l’indépendance en 2011, mais l’a aussi entraîné dans une guerre civile dévastatrice, dont le pays peine à se remettre.

Sa rivalité avec son ennemi juré Riek Machar a plongé la plus jeune nation au monde dans la guerre en décembre 2013.

Marqué par des atrocités interethniques, des viols et des tortures, ce conflit a fait en cinq ans plus de 380.000 morts, déplacé environ 4 millions d’habitants, soit le tiers de la population, provoqué une grave crise humanitaire et détruit l’économie déjà chancelante du pays.

“Je ne suis pas vraiment fier parce que nous nous sommes battus. Les choses que nous avions faites ont été détruites, et nous devons donc recommencer encore et encore”, a déclaré M. Kiir jeudi dans une interview à la télévision kényane.

Cette haute silhouette coiffée d’un chapeau de cowboy – l’original était un cadeau de l’ancien président américain George W. Bush – occupe la présidence depuis 2011. Mais ce fervent catholique, avare de sourires, a passé l’essentiel de sa vie les armes à la main.

Né en 1951 dans l’État reculé et pastoral de Warrap (Nord), ce membre de l’ethnie Dinka, la plus importante du pays, a combattu pendant la première guerre civile (1956-1972) et la seconde (1983-2005), qui a mené le pays à se séparer du Soudan en juillet 2011.

Chef militaire, il devient dirigeant politique avec réticence en 2005, à la mort du chef historique de la rébellion sudiste, John Garang, dans un mystérieux crash d’hélicoptère en Ouganda.

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“La plupart des Sud-Soudanais considèrent Kiir comme un président par accident qui n’est arrivé au pouvoir qu’à cause de la mort inattendue de John Garang, avec lequel il avait souvent eu des différends, même s’il était son adjoint”, remarque pour l’AFP Alan Boswell, expert auprès de l’International Crisis Group (ICG).

– Enrichissement personnel –

Contrairement à John Garang, chantre d’un Soudan fédéral uni, laïque et démocratique, “Salva” est un ardent défenseur de la sécession du Sud. En 2005, il deviendra président de ce qui n’est encore que la région semi-autonome du Sud-Soudan.

Il manœuvre ensuite avec assez d’habileté pour conduire le Soudan du Sud à l’indépendance, à l’issue d’un référendum d’autodétermination.

Salva Kiir devient alors le premier président d’un pays extrêmement pauvre et dépourvu de toute infrastructure, malgré de considérables réserves pétrolières.

Très vite toutefois, la nouvelle élite sud-soudanaise cherche à s’accaparer les maigres ressources du pays, instrumentalisant pour ce faire la question communautaire.

Tout bascule en décembre 2013 quand Salva Kiir accuse l’ancien vice-président Riek Machar, un Nuer, qu’il a limogé quelques mois plus tôt, de fomenter un coup d’État. Des combats éclatent au sein de l’armée nationale, minée par des dissensions politico-ethniques.

Un rapport d’experts de l’ONU attribuera en janvier 2016 à Salva Kiir et Riek Machar la responsabilité de la majorité des violences commises depuis le début du conflit.

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Les deux dirigeants ont aussi été accusés de s’être personnellement enrichis durant la guerre, selon un rapport du groupe d’investigation The Sentry.

“Le président Kiir et sa famille ont amassé une importante fortune, largement supérieure à ce qu’il aurait pu gagner avec sa fonction officielle, et a déposé une large part de ses avoirs hors du Soudan du Sud”, a établi ce rapport.

The Sentry a également affirmé que M. Kiir et sa famille s’étaient associés à des compagnies étrangères peu scrupuleuses pour détourner à leur profit certaines des ressources naturelles du pays, minières notamment.

Salva Kiir est un dirigeant mystérieux. “Il a franchi les échelons au sein de la SPLA (l’Armée populaire de libération du Soudan, qui combattait Khartoum lors de la seconde guerre civile) comme agent de renseignements”, souligne Alan Boswell.

“Même pour ses conseillers les plus proches, il est souvent une énigme. Il écoute plus qu’il ne parle et peut surprendre ses conseillers en changeant brusquement de position”, ajoute-t-il. “Parfois, il a servi à réconcilier la nation, parfois à la diviser”.