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Sous escorte des talibans, des Indiens évacués d’Afghanistan en pleine nuit

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Sous escorte des talibans, des Indiens évacués d’Afghanistan en pleine nuit
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Dans l’enceinte de l’ambassade indienne, 150 diplomates et ressortissants indiens espèrent pouvoir partir pour l’aéroport, de plus en plus nerveux: devant la grille en fer de l’entrée, des talibans revenus la veille au pouvoir en Afghanistan attendent, armés de mitrailleuses et de lance-roquettes.

Au fil des heures en ce lundi qui suit la prise sans combats de la capitale afghane par les talibans, l’angoisse devient de plus en plus palpable dans l’ambassade où tous suivent attentivement les informations.

Ces Indiens en attente de rapatriement ont bien conscience qu’en raison de leur nationalité, ils se trouvent dans une situation délicate.

Le Pakistan, grand rival de l’Inde, a longtemps été le principal pays à soutenir les talibans, au pouvoir à Kaboul de 1996 à 2001.

Et New Delhi a largement soutenu le gouvernement qui les a remplacés, une fois les “étudiants en religion” afghans chassés du pouvoir par une coalition menée par les Etats-Unis dans la foulée des attentats du 11 septembre 2001. Ce qui lui a valu la haine des combattants fondamentalistes.

En réalité, les combattants talibans qui attendent devant la grille de l’ambassade ne sont pas là pour se venger mais pour escorter le groupe d’Indiens jusqu’à l’aéroport de Kaboul, où un avion militaire est prêt à les évacuer après la décision de New Delhi de fermer sa représentation diplomatique dans le pays.

Quand le premier d’une vingtaine de véhicules quitte l’ambassade lundi en fin de journée, certains des combattants saluent même en souriant les passagers, parmi lesquels se trouve un correspondant de l’AFP.

Un combattant les guide jusqu’à la rue permettant de sortir de la zone verte pour gagner la route de l’aéroport.

Un quart des quelque 200 personnes au total qui avaient rejoint l’ambassade dans l’attente d’une évacuation a pu quitter le pays avant la prise de Kaboul.

“Alors qu’on évacuait le deuxième groupe (…) nous nous sommes retrouvés face aux talibans qui ont refusé de nous laisser sortir de la zone verte”, raconte un fonctionnaire parti lundi.

“Nous avons alors décidé de contacter les talibans et de leur demander d’escorter notre convoi”.

Mais deux promesses successives d’escorte tardent à se matérialiser durant la journée, faisant monter l’angoisse dans l’ambassade où l’expérience évoque une “mise en résidence surveillée”, selon un diplomate.

– “Il était temps de partir” –

La nuit est tombée depuis plusieurs heures lorsque les véhicules finissent par pouvoir tous quitter l’enceinte de l’ambassade pour rejoindre l’aéroport situé à cinq kilomètres.

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Le trajet s’effectue à une vitesse d’escargot et prend cinq heures durant lesquelles les passagers redoutent à chaque instant d’être attaqués.

La route est jalonnée de nouveaux postes de contrôle et des milliers de personnes qui ont fui leur domicile marchent tout du long.

Régulièrement, les combattants talibans qui accompagnent le convoi indien sortent de leurs propres véhicules pour pointer leurs armes sur la foule et l’obliger à reculer.

Un homme qui semble être à leur tête tire quelques coups de feu en l’air pour disperser un groupe rassemblé à un carrefour.

L’escorte repart une fois le convoi arrivé à l’aéroport, où des soldats américains ont pris position.

Après deux nouvelles heures d’attente, le groupe monte finalement à bord d’un avion de transport militaire indien C-17. L’appareil décolle à l’aube avant d’atterrir sur une base aérienne indienne dans la matinée de mardi.

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“Je suis tellement heureux d’être de retour”, déclare à l’AFP Shirin Pathare, un employé d’Air India, à sa descente de l’avion. “L’Inde, c’est le paradis”.

Un de ses compatriotes, sa fille de deux ans dans les bras, raconte le chaos et l’inquiétude ressentie quand il a été contraint de quitter précipitamment son bureau.

“Quelques heures avant que je prenne l’avion, un groupe de talibans s’est rendu sur mon lieu de travail”, explique cet homme qui n’a pas souhaité donner son nom à l’AFP.

“Ils étaient polis mais quand ils sont partis, ils ont pris deux de nos véhicules” et “j’ai immédiatement su qu’il était temps pour moi et ma famille de partir”.