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Trop de tuk-tuks, pas assez d’ouvriers: le casse-tête du Sri Lanka

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Trop de tuk-tuks, pas assez d’ouvriers: le casse-tête du Sri Lanka

Asitha Udaya Priyantha a trouvé son job de rêve: le jeune homme de 22 ans sillonne les rues du Sri Lanka à bord de son auto-rickshaw, gardant tout l’argent pour lui et ne devant répondre à personne.

Des trajectoires comme la sienne font s’arracher les cheveux au gouvernement de Colombo, qui assiste dépité à la ruée de sa jeunesse pour devenir chauffeur de taxis, emploi synonyme de liberté.

Car, dans le même temps, un million d’emplois dans des secteurs comme la construction ne sont pas pourvus et doivent être remplis en faisant venir de la main-d’?uvre étrangère.

Ce scénario est un étonnant retournement de situation pour l’île de l’océan Indien, qui a traditionnellement envoyé ses ouvriers au Moyen-Orient et bénéficié de leurs envois d’argent au pays à travers les décennies de la guerre civile.

Sur fond de décollage économique, les autorités essayent de convaincre les Sri-Lankais expatriés de revenir travailler au pays, offrant des salaires plus compétitifs et autres avantages susceptibles de les séduire.

Les décideurs en ont aussi assez de voir les jeunes bras devenir conducteurs de rickshaws, un secteur déjà saturé. Il y a 1,2 million de chauffeurs de ces trois-roues au Sri Lanka, bien trop pour ce pays de 21 millions d’habitants selon un syndicat des chauffeurs de tuk-tuks.

“Si nous continuons comme ça, les jeunes n’occuperont aucun autre emploi dans ce pays”, s’inquiète Rohana Perera de l’Association unie des chauffeurs de trois-roues et de l’industrie.

Pour à peine 50.000 roupies (280 euros), somme facilement trouvable grâce à des prêts auprès de la famille, un jeune homme peut s’acheter un véhicule et immédiatement commencer à gagner de l’argent.

Fatigué des longues heures de travail et de la mauvaise paye dans un studio photo, Asitha Udaya Priyantha a décidé de changer de voie.

“J’ai épargné un peu d’argent et je me suis acheté un trois-roues. Maintenant je suis mon propre patron”, dit-il à l’AFP.

“J’ai plus de liberté et je gagne deux fois plus.”

– Formation –

Pour endiguer le flux de nouvelles recrues, les syndicats veulent que l’âge minimum pour conduire un rickshaw soit relevé de 18 à 35 ans. Certains proposent également de stopper les importations de ces véhicules d’Inde pour couper la source d’approvisionnement.

Pour l’Association des chauffeurs professionnels de trois-roues, le manque de formation professionnelle au Sri Lanka est ce qui pousse les jeunes à s’installer derrière un guidon plutôt que de prendre des emplois mieux payés dans d’autres secteurs.

“A moins qu’il y ait des changements radicaux pour préparer les personnes en décrochage scolaire à un emploi à valeur ajoutée, ils prendront un raccourci et commencent à conduire des trois-roues”, explique à l’AFP Nishantha Perera, un de ses membres.

La fuite des jeunes travailleurs vers les rickshaws aggrave la crise de l’emploi, dans une économie qui connaît une solide croissance depuis la fin de 37 ans de guerre civile en 2009.

Le secteur de la construction a été forcé de se tourner vers l’Inde, le Bangladesh et le Népal pour trouver les 400.000 paires de bras dont elle a besoin pour ériger les hôtels et tours qui poussent comme des champignons dans les villes de l’île.

Des entrepreneurs du bâtiment vont jusqu’à offrir des motos ou des voitures en bonus aux travailleurs qui accepteraient un chantier dans leur patrie.

Le gouvernement espère que la hausse des salaires et la bonne santé économique incitera une partie des environs deux millions de Sri-Lankais à l’étranger à revenir au pays.

“Dans l’industrie de la construction déjà, les salaires sont comparables à ce qui est offert dans les pays du Moyen-Orient”, déclare Mangala Samaraweera, ministre des finances.

“Je suis sûr que nombre d’entre eux préféreraient revenir car ils seraient plus proches de leurs familles et les conditions de travail (au Sri Lanka) sont bien meilleures”, affirme-t-il.

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