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Washington, coeur du pouvoir américain anesthésié par la pandémie

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Derrière les grandes baies vitrées de la Banque mondiale, les agents de sécurité sont fidèles à leur poste mais désoeuvrés. Les trottoirs sont presque vides. Washington s’apprête à “accueillir” ses réunions financières internationales, comme deux fois dans l’année. Mais en tout virtuel.

Sur le bâtiment “HQ2” du Fonds monétaire international (FMI) voisin, l’écriteau “fermé temporairement” a été apposé il y a … plus de six mois déjà.

En ce début octobre, à un mois de l’élection présidentielle, la capitale fédérale des Etats-Unis peine à sortir de l’anémie dans laquelle la pandémie de Covid-19 l’a subitement plongée.

Les 12.000 participants aux réunions du FMI et de la Banque mondiale n’arpenteront pas à partir du 12 octobre les rues d’un centre-ville devenu pimpant et exemple de la régénérescence des “downtowns” américains; ils resteront derrière leurs ordinateurs.

Outre une activité politique trépidante, la ville s’était imposée ces deux dernières décennies comme un grand centre international de conférences.

Avant la pandémie, “nous avions une fréquentation record à Washington, grâce aux conférences, aux réunions (internationales) mais aussi au secteur des loisirs”, souligne Elliott Ferguson, PDG de l’organisation Destination D.C. Et l’économie locale en bénéficiait.

Tout a basculé au printemps quand le Grand confinement a été décrété. “Nous étions en passe d’avoir plus de 25 millions de visiteurs, avec plus de 42 grands congrès”, regrette M. Ferguson dans un entretien à l’AFP. Il n’en attend plus que 11 millions désormais.

– Télétravail massif –

Certes, quelques quartiers branchés ont retrouvé vie. Terrasses de restaurants et “rooftops” ont recommencé à se remplir par les belles soirées d’été, grâce à la clientèle locale.

Mais non loin de la Maison Blanche, nombre de fast-foods de K Street, artère centrale du centre-ville où avocats et lobbyistes pressés se ruaient à l’heure du déjeuner, n’ont pas rouvert ou attirent quelques clients isolés.

Et pour cause, les milliers d’employés institutionnels — dont 9.000 du groupe de la Banque mondiale sans compter ses consultants — sont toujours en télétravail, jusqu’à la fin de l’année.

Les “cols blancs” qui peuplent les bureaux de ce centre névralgique de la politique américaine et internationale ont pour l’immense majorité obtenu ou choisi de travailler à distance.

Avec l’assentiment de la maire démocrate de la ville, Muriel Bowser, qui mène une des stratégies les plus strictes du pays pour garder la pandémie sous contrôle: 629 morts et plus de 15.473 infections.

– Hôtels vides –

Résultat, fin juillet, l’activité économique du centre-ville de Washington D.C (pour District of Columbia), ne représentait que 12% du niveau de juillet 2019, avec 95% de salariés en télétravail, selon l’association Downtown D.C Business Improvement District. Le taux d’occupation des hôtels n’y était que de 8% en juin contre 74% en février.

Une employée d’une pharmacie CVS, à deux pas du siège du FMI, confie que les jours de l’établissement sont comptés si les institutions ne rouvrent pas.

Avec au mieux 200 prescriptions par semaine contre plus de 1.000 avant la pandémie et des horaires calés sur ceux des bureaux avoisinants, tenir six mois supplémentaires relève de la gageure.

“S’il n’y a personne au bureau, rester ouverts ne présente aucun intérêt”, dit-elle sous couvert d’anonymat.

Malgré l’atmosphère morose, Gregory O’Dell, à la tête du Walter E. Convention Center, le temple des conférences en tous genres, veut croire à des lendemains meilleurs.

Le Centre, qui accueille 1,5 million de visiteurs chaque année, a rouvert mi-septembre, dévoilant une panoplie d’équipements sophistiqués pour se prémunir contre le coronavirus.

– Intelligence artificielle –

Le bâtiment, situé au coeur de Washington, a été réaménagé avec des scanners prenant la température corporelle des visiteurs.

Les surfaces intérieures sont pulvérisées régulièrement avec un désinfectant ciblant le virus.

L’intelligence artificielle permet, elle, de surveiller les visiteurs et d’alerter le personnel si les gens se rapprochent dangereusement.

Avec l’annulation de 93 événements cette année, les pertes sont substantielles: 345,5 millions de dollars.

“Aujourd’hui, plus que jamais, il est important (…) de se rassembler”, estime pourtant Greg O’Dell. “Les conventions et réunions, les sports et les divertissements ont le pouvoir de le faire, même virtuellement”.

Et si les gens prenaient goût au tout virtuel?

“Je ne crois pas que nous puissions nous y habituer”, opine Elliott Ferguson. “Nous connecter en vrai nous manque à tous”, car rien ne remplace la véritable interaction humaine.

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